Protestants, toujours coupables?
Ils s’imposent une rigueur devenant, pour certains, source d’auto-accusation… Pourtant, dans son Catéchisme protestant, le pasteur Antoine Nouis écrit que «nous sommes libérés de la culpabilité» pour «discerner, jour après jour, les implications de notre fidélité et de notre salut».
Alors, oui, le protestant est pardonné gratuitement par Dieu. Et il est appelé à «se sanctifier» pour vivre selon cette grâce reçue. Le problème, c’est qu’il le prend pour un objectif à atteindre. Et justement, articule Pierre-Yves Brandt, théologien et professeur de psychologie de la religion à Lausanne, «s’il croit ne pas y parvenir, il pensera n’être jamais digne et risquera de se sentir accablé». Surtout «si cette exigence de rectitude provient de l’extérieur, en l’occurrence de l’Eglise, jadis omniprésente: elle peut alors apparaître comme une loi inaccessible». L’Eglise semblera par conséquent culpabilisante.
Débat direct avec Dieu
Par ailleurs, si l’Eglise catholique peut «gérer» les fautes des fidèles et les remettre – notamment à travers le sacrement de la confession –, en protestantisme, les personnes reçoivent la confirmation de leur pardon dans le débat direct avec Dieu. Or, là, aucune certitude humaine n’est jamais garantie.
Cette culpabilité est alimentée par une religiosité affirmant connaître le «juste» chemin pour les personnes. Or, note encore Pierre-Yves Brandt, l’époque où l’Eglise représentait la conscience morale d’une société chrétienne homogène est révolue. La pression sociale sur les fidèles, bien souvent culpabilisante, devrait dès lors avoir cessé. Et l’adhésion de la foi, qui répond d’un choix personnel, peut retrouver sa force libératrice.