Le dialogue interreligieux, un impératif

Un recueillement interreligieux a attiré 400 personnes en octobre dernier à Genève. / © Alain Grosclaude
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Un recueillement interreligieux a attiré 400 personnes en octobre dernier à Genève.
© Alain Grosclaude

Le dialogue interreligieux, un impératif

Ensemble
Les échanges entre les communautés religieuses s’adaptent aux tensions mondiales en favorisant la compréhension et la coopération, malgré les défis posés.

Face à l’intensification des conflits mondiaux, les acteurs du dialogue interreligieux réaffirment leur rôle crucial. Katja Joho, directrice d’Iras Cotis, la Communauté de travail interreligieuse en Suisse, souligne l’importance des discussions pour construire des «chemins communs», bien que ce travail reste «complexe et perturbé». Manuela Hugonnet, aumônière de l’Eglise catholique de Neuchâtel, appelle à dépasser «les peurs» à travers des initiatives collectives. 

Préserver le dialogue au travers des activités et des célébrations est devenu une nécessité. Dans cette visée, le Conseil d’Etat du canton de Neuchâtel a inauguré, en novembre dernier, une plateforme en partenariat avec le Dialogue interreligieux du canton (DINE). Son souhait: désamorcer les tensions autour des questions religieuses tout en encourageant un dialogue concret. 

Par ailleurs, le vendredi 7 juin 2024, un événement marquant a réuni chrétiens, juifs et musulmans entre Neuchâtel et La Chaux-de-Fonds pour célébrer la naissance de la République et Canton de Neuchâtel. Cette journée, axée sur la découverte de la diversité liée à la foi, s’est distinguée par son ouverture. Dans le prolongement, le DINE a été sollicité pour donner une formation destinée aux étudiants de la HEP-BEJUNE. 

L’an dernier, la Semaine des religions en Suisse a rassemblé plus de 30 équipes issues d’au moins huit confessions pour organiser une centaine de manifestations autour de deux thèmes principaux: la paix et l’implication des jeunes.

Moins d’intérêt des jeunes

Selon Miriam Amrani, Patrizia Conforti et Reto Dörig, du Groupe interreligieux de Fribourg (GIF), les jeunes, déjà immergés dans un environnement multiculturel à l’école, ressentent moins le besoin de participer à des initiatives spécifiques de dialogue interreligieux. Cependant, leur présence a été marquée dans le cadre d’activités comme «Dialogue en Route», un programme destiné aux 15-25 ans. La paix a été un fil rouge de cette édition, avec des événements comme une promenade à Neuchâtel ayant réuni plus de 100 participants ou encore une journée d’échange dans le canton de Vaud. 

Un recueillement interreligieux organisé à Genève le 7 octobre dernier, une année après l’attaque du Hamas contre Israël, a attiré 400 personnes à la cathédrale, témoignant d’un fort besoin de rassemblement. En parallèle, des initiatives concrètes continuent de prospérer, comme les cultes œcuméniques dans les paroisses catholiques et protestantes de Neuchâtel, ainsi que l’accompagnement spirituel dans les hôpitaux et EMS par des aumôniers issus de diverses communautés.

L’émotionnel omniprésent

Agnès Krüzsely, diacre de l’Eglise protestante de Genève (EPG), souligne l’importance des relations amicales pour «maintenir le dialogue, même lorsque des loyautés divergentes émergent». De son côté, Manuela Hugonnet met en garde contre la tentation de «transposer les conflits d’ailleurs sur le local». Elle admet toutefois la difficulté de rester neutre: «L’émotionnel est omniprésent et on ne peut l’ignorer.» 

Anne Kaufmann, représentante du DINE, aborde la question sous l’angle du pardon et du soutien spirituel: «Les conflits laissent des cicatrices. Sans une aide, comment retisser des liens?» Au sein du Groupe interconfessionnel pour la paix (GIF), des débats ont éclaté sur la question de l’engagement politique. Certains membres ont opté pour des prises de position explicites, suscitant des tensions et des départs. «Notre groupe est apolitique et prie pour les victimes de tous bords», explique un représentant. Le GIF reste ouvert à un retour des anciens membres, dans l’espoir que «le temps panse les divisions».