Genève : Luther gagne en envergure au Musée international de la Réforme

légende / crédit photo
i
[pas de légende]

Genève : Luther gagne en envergure au Musée international de la Réforme

26 janvier 2012
Un document rare du réformateur allemand, écrit deux ans avant sa mort, entre en grandes pompes au Musée international de la Réforme (MiR). Dans ce brouillon, Luther redit avec verdeur sa conception de la sainte Cène. Le prêt d'un tableau de Cranach vient encore enrichir la première salle de l'institution genevoise.


« Lettre à un bon ami. » C'est l'intitulé du manuscrit inédit signé Martin Luther et acquis en avril dernier à Paris par un collectionneur lors d'une vente aux enchères. L'homme le met aujourd'hui gracieusement à disposition du MiR. « On ne connaissait jusqu'ici que la version imprimée de ce document », s'enthousiasme Isabelle Graesslé, directrice du musée. Le dépôt pourrait doper la fréquentation du musée genevois qui accueille près de 20 000 visiteurs par an.

De fait, le « bon ami » à qui s'adresse le réformateur en 1544 n'existe pas. La formule rhétorique vise à toucher le lectorat le plus large. En fin de vie, l'ancien moine n'y va pas par quatre chemins. Illuminés (exaltés), juifs, papistes, chacun en prend pour son grade. Il redit aussi avec vigueur sa vision de la sainte Cène : selon lui, le Christ est réellement présent dans les espèces (pain et vin). Calvin et le Zurichois Zwingli s'y opposeront leur vie durant. « A l'époque, la question est essentielle », note la théologienne d'origine alsacienne.

« Fin de règne »

Et aujourd'hui ? Moins. Mais le manuscrit touche. « Il s'agit réellement d'un brouillon, avec des ratures et des ajouts », explique Simona Sala, conservatrice. Issu d'une très ancienne collection française, le document comporte de nombreuses différences avec l'imprimé. « Il se distingue par une certaine urgence, sent la fin de règne », souffle la directrice. Luther l'avouera lui-même : « Il est plus véhément qu'il ne convient »...

A deux pas de la lettre, signé du peintre Cranach, un portrait du réformateur allemand donne un éclat discret à la salle d'entrée du MiR. L'huile à fond bleu givré, datée de 1530, a été vendue quelques jours après l'ouverture de la galerie genevoise De Jonckheere, à deux pas du musée. « Les deux hommes étaient proches ; l'artiste a été le témoin de mariage du théologien », raconte l'historienne de l'art Alice Frech, représentante de la galerie. Le prêt court jusqu'à juin.

Ces acquisitions, tout comme le rafraîchissement de la vitrine consacrée à Luther et la mise en place de deux bornes tactiles, permettent au musée de « rendre au début de la Réforme sa vraie valeur », comme l'affirme Françoise Demole, présidente du Conseil de fondation du MiR. Et, aux côtés de Calvin et d'autres, à Luther de gagner en envergure. S. R.

Le printemps du MiR

A l'aube de 2012, le musée de la Maison Mallet reconduit les soirées « Mon musée de la Réforme ». Les soeurs Bisang (Anne et Laurence), l'ex-recteur de l'Université de Genève André Hurst et la fraîchement retraitée conseillère nationale Martine Brunschwig Graf sont invités (toutes les dates sur le site). Marc Liehnard, doyen honoraire de la faculté de théologie protestante de Strasbourg, animera pour sa part une conférence sur Luther le 1er février à 18h30: de l'homme révolté au réfomateur passionné. Des visites guidées et des animations pour les familles sont aussi à l'agenda.Cet article a été publié dans :

Le quotidien fribourgeois La Liberté le samedi 28 janvier 2012.