Regards Neufs: une expérience de cinéma pour aveugles et malvoyants

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Regards Neufs: une expérience de cinéma pour aveugles et malvoyants

29 août 2013
Accéder au cinéma et à la culture quand on souffre d’une déficience visuelle? C’est possible grâce à l’engagement de plusieurs associations actives sur ce terrain. Les rencontres «Regards Neufs» organisées à Lausanne les 30 et 31 août, visent à les faire mieux connaître et à rappeler que ces expériences peuvent être plus largement partagées.

Par Anne-Sylvie Mariéthoz

Murielle, Claudine et Marie-Pierre disent vouer au cinéma une véritable «passion». Un mot qui revient souvent dans la bouche de ces trois femmes, affectées d’un handicap de la vue et partageant une même fringale de culture.

Murielle Siksou qui s’attache à développer ce type d’offres au sein de la section vaudoise de la Fédération suisses des aveugles et malvoyants (FSA), dit puiser beaucoup de force et de satisfactions dans ces activités «qui nous rassemblent tous». Plus jeune, elle s’était offert le plaisir d’arpenter les étoiles d’Hollywood Boulevard et elle n’a jamais manqué une édition du Festival de Cannes à l’époque où elle habitait la région.

Mais plus que ce «côté paillettes», ce qui l’attire dans cet art c’est sa façon de «documenter le monde tout en nous offrant la possibilité de rêver.» Comme elle, Marie-Pierre Assimacopoulos, aveugle de naissance, sait gré au cinéma «de tous ces univers auxquels il nous donne accès.»

Elle s’y rend très régulièrement pour apprécier des oeuvres aussi différentes que le récent «Hannah Arendt», très dialogué, ou «Le secret de Brokeback Mountain», tout en émotions et en non-dits, «mais dégageant une atmosphère incroyable.»



Canne blanche sonore


Les séances de cinéma en audio-description proposées par Regard Neufs - depuis 2011 dans les salles Pathé de Lausanne et depuis cet automne à Genève - permettent de rendre cette expérience accessible aux personnes atteintes d’une déficience visuelle. Une voix off placée entre les dialogues, décrit les éléments visuels et sert de repère. «Elle nous assure de ne pas nous perdre en route et de ne manquer aucun détail signifiant (la lettre d’aveu, le sms qui fait basuler l’intrigue, etc…)», résume Claudine Damay, également active au sein de la FSA.

Depuis 2014, une loi française impose à tous les producteurs de films de l’Hexagone, de prévoir une version en audio-description. La Suisse accuse par contre un certain regard à cet égard, «même si la RTS fait des efforts remarquables et propose plus de films que ce la loi prévoit», note Claudine Damay, qui se souvient d’une époque où l’offre était bien plus rare. «On se jetait dessus comme la misère sur le pauvre monde», sourit-elle.

Il reste cependant beaucoup à faire pour populariser ce procédé, notamment auprès des personnes aveugles et malvoyantes, trop souvent convaincues que le cinéma n’est pas à leur portée, selon elle. 



Cinq pourcents de la population


C’est le but d’un événement «pédagogique et festif» comme celui proposé ce week-end: rassembler les forces, sensibiliser, faire connaître cette offre enfin, tant auprès des voyants que des malvoyants. Car, comme le rappelle Bruno Quiblier de Regards Neufs, pas moins de 5% de la population est concernée par cette problématique.

Or pour ces personnes, l’accès au cinéma peut être compliqué par toutes sortes d’aspects pratiques, hormis la compréhension du film lui-même. Aussi les accompagnants se voient-ils offrir l’entrée aux séances de Regards Neufs, dans un but incitatif. «Nous voulons donner l’idée à tout un chacun, de proposer cette sortie à sa tante, son neveu, son voisin...», explique Julie Henoch, chargée de communication du projet.

Le Flon aux associations


Au cœur de la manifestation, le cinéma audio-décrit sera présenté concrètement au public, soit au travers d’un riche programme de films récents, soit au cours d’ateliers. «Il s’agit d’une écriture très particulière», explique Bruno Quiblier, «qui requiert beaucoup de sensibilité et de concision.»

Côté animations, il signale en particulier l’intervention des Legroup, une fanfare déjantée qui emmènera le public pour un concert ambulant en suivant les lignes de guidage, histoire de rappeler l’usage de ces précieux repères podo-tactiles, permettant aux personnes malvoyantes de se déplacer en ville.

Plusieurs associations seront également présentes sur l’Esplanade du Flon, dont le groupement des skieurs aveugles (GSA) ou la Bibliothèque sonore romande (BSR). Toutes deux grandes dévoreuses de littérature, Claudine et Marie-Pierre soulignent à cet égard, à quel point la contribution des bénévoles est précieuse, notamment celle des lecteurs qui permettent d’étoffer le choix de document disponibles «et nous apportent énormément dans notre vie quotidienne.»


Regards Neufs

Regards Neufs
produit et propose des longs métrages en audio-description dès le premier jour de leur sortie en salle. 
Les séances ont lieu à 10h30:

- chaque premier dimanche du mois au Pathé Flon à Lausanne 

- chaque dernier dimanche du mois au Pathé Rialto à Genève 
Lancé en 2011 par l’association lausannoise Base-Court, ce projet aimerait à terme s’étendre à l’ensemble de la Suisse.

Programme

Vendredi 30 août 
Cinéma audio-décrit
:
- 20h «Marius» de Daniel Auteuil
, précédé du court-métrage «L’accordeur» d’Olivier Treiner



Samedi 31 août
Cinéma audio-décrit:
-
 11h Aya de Yopougon de C. Oubrerie et M. Abouet
- 
14h Programme de courts métrages
- 
20h Jeune & Jolie de François Ozon



Activités autour du handicap visuel
:
- 10h-18h Animations et informations des associations
- 
11h-17h Visite guidée de la Bibliothèque sonore romande 

- 11h, 12h30, 15h et 17h Atelier d’audiodescription

- 18h Concert ambulant de la fanfare Les Leproup