La planète brûle, mieux vaut en rire

Swann Périssé et Thomas Wiesel / ©DR
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Swann Périssé et Thomas Wiesel
©DR

La planète brûle, mieux vaut en rire

Humour
Rabat-joie, l’écologie? Maintenant que l’époque des manifs pour le climat est passée et qu’il s’agit de légiférer, le sujet a tendance à diviser. Il passe mieux sur le ton de l’humour.

Swann Périssé: L’art de la joie

En 2020, la youtubeuse française Swann Périssé lance sa série Vert chez vous. Le ton est léger, sans filtre, mais l’objectif ambitieux. Avec sa roulotte, elle part sur les routes à la rencontre de ses abonnés pour réaliser avec elles et eux des projets écologiques: construction de toilettes sèches, élaboration d’un potager, confection de yogourts maison, passage au zéro déchet pour l’ensemble d’un ménage, etc. Pas de culpabilisation de la part de cette comédienne, diplômée en sciences politiques, mais une recherche ouverte de solutions, menée avec une joie de vivre communicative.

Le format fonctionne: alors que la crise sanitaire impose une sérieuse réflexion sur nos modes de vie, Swann Périssé popularise à sa manière l’écologie et la décroissance. Mais le rythme est épuisant et l’échelle des actions individuelles, forcément limitée, ne satisfait plus la jeune femme. Au bout de deux ans, elle lance avec le producteur Binge Audio un talk-show écologique solide et désopilant. Dans Y’a plus de saisons – toujours disponible sur YouTube et enregistré en public –, elle reçoit des figures de la lutte écologique (Claire Nouvian, Cyril Dion, Timothée Parrique et «le king du bilan carbone» Jean-Marc Jancovici…). Entre deux blagues, elle popularise des concepts pas évidents – chalutage profond, écorésistance, justice climatique… L’humour est plus ciselé. Mais le podcast se politise au fil du temps, il devient même ultra-politique.

Thomas Wiesel: Sniper, l’air de rien

Le 19 novembre prochain, il sera la guest-star de la soirée d’ouverture de la Semaine du climat. Qu’il intervienne à Alternatiba ou au Forum des 100, l’humoriste Thomas Wiesel est apprécié pour sa maîtrise du «roast», cet art très américain qui consiste à passer sur le gril une personnalité, et à faire rire (jaune) un public. La force du stand-uppeur suisse? Sa capacité à placer devant leurs contradictions, faiblesses ou franches erreurs toutes les sensibilités présentes dans la salle. Et son sens de l’actualité : ses interventions englobent savamment ce qui a été dit dans la soirée et le contexte politique local.

L'avis de BREF

Sur l’environnement aussi, on peut prendre les choses avec légèreté. Ce n’est pas parce que l’on en rit que ce n’est pas important, et inversement. C’est justement parce que c’est amené par le rire que l’on arrive à se dire que quelque chose ne tourne pas rond, plutôt que par des rapports qui peuvent être moralisateurs.

L’humoriste est notoirement engagé pour la planète. En 2020, à l’invitation de la Grève du climat, il attaquait en règle des membres du Credit Suisse. Sur la vidéo, toujours en ligne, on entend les rires se tasser petit à petit. «On vit dans un pays où si tu fous un peu de peinture sur une vitre, t’as une condamnation; par contre, si t’es responsable de millions de tonnes de CO2 dans l’atmosphère, t’as une villa avec vue sur le lac de Zurich.» (En référence aux activistes pour le climat condamnés en première instance pour leur militantisme face à Credit Suisse et à la situation de Tidjane Thiam, CEO de l’entreprise à l’époque, NDLR.)

Pour certains organisateurs d’événements, il est le seul humoriste romand à la fois aussi documenté et précis sur le sujet. Thomas Wiesel s’inclut dans ses blagues, moins comme un distributeur de bons et mauvais points que comme un révélateur des contradictions propres à la nature humaine. Il rassemble ainsi bien au-delà des clivages.