Le cœur noir

Le cœur noir / ©Mathieu Paillard
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Le cœur noir
©Mathieu Paillard

Le cœur noir

Rodolphe Nozière
25 septembre 2024
Conte
Il était une fois, dans un royaume désormais oublié, une reine d’une grande beauté, mais dont le cœur était rempli de jalousie, de haine et d’égoïsme.

Un jour, elle fit la connaissance d’un roi très riche, mais un peu plus âgé qu’elle, qui avait eu une fille d’un précédent mariage, prénommée Rose. Agée de 16 ans, elle était sympathique, toujours prête à prendre soin des autres… tout le contraire de la reine.

Souhaitant s’emparer du royaume et des richesses de ce roi, la reine lui proposa de l’épouser. On prépara de grandes fêtes dans les deux royaumes et pendant des semaines ce ne fut que chansons, repas et festivités.

Quelques mois plus tard, le roi mourut dans d’étranges circonstances. La reine pleura longtemps, surtout en public… Rose fut elle aussi très triste, mais plus encore pour le royaume qui avait perdu un roi juste, bon et pacifique.

La souveraine, à l’abri des regards, était des plus heureuses: elle était devenue si riche, possédait un plus grand royaume et ce n’était pas Rose, si innocente, qui risquait de convoiter quoi que ce soit de l’héritage de son père.

Pourtant, au bout de quelques années, la sympathie du peuple pour la jeune princesse avait grandi et certains commencèrent à critiquer cette reine égoïste et obsédée par les richesses, qui les écrasait d’impôts.

Celle-ci s’inquiéta pour son trône et, surtout, de la popularité de Rose. Elle alla consulter une vieille sorcière qui lui conseilla de se débarrasser de la jeune fille.

La sorcière lui proposa un enchantement: un objet magique qui, une fois porté par la princesse, la tuerait à coup sûr. La reine décida de lui offrir un collier de perles, avec en son centre un saphir d’un bleu éclatant.

La sorcière versa divers ingrédients dans son chaudron et quelques gouttes du sang de la souveraine, dans lesquelles il y avait toute la haine que celle-ci pouvait éprouver pour Rose. Une épaisse vapeur violette s’échappa du chaudron tandis que la reine riait de la mort prochaine de la princesse.

Quelques jours plus tard, à l’occasion des 20 ans de Rose, la reine organisa une grande fête et lui offrit le collier maléfique. Rose l’accepta, bien que gênée de recevoir un cadeau d’une si grande valeur.

La reine insista pour le lui accrocher elle-même autour du cou. Au contact de ce collier, Rose ne tarda pas à se sentir fatiguée et devint chaque jour un peu plus pâle et faible. La reine faisait semblant de s’inquiéter de sa santé et lui envoyait les meilleurs médecins du royaume, qui ne parvenaient pas à identifier l’origine de son étrange maladie.

Rose mourut un matin. La souveraine exprima de nouveau la tristesse du deuil. Le collier enchanté avait fait son effet. Cette fois, le peuple se rebella et manifesta sa colère d’avoir perdu la princesse, accusant la reine de l’avoir assassinée. Celle-ci pleura encore plus fort et proposa de construire un monument pour y déposer le cercueil de Rose. Elle apaisa un moment la colère et la révolte.

Peu de temps après, des cambrioleurs entrèrent dans le monument funéraire. La pauvreté poussait les gens au vol pour survivre.

Les voleurs avaient pu voir le fabuleux collier au cou de la princesse avant que son cercueil ne soit fermé. Un collier d’une si grande valeur pourrait les sauver de la famine et même nourrir tout un village pendant des années…

Ils ouvrirent le cercueil, prirent le collier. Aussitôt, ils virent la princesse prendre une profonde inspiration, son visage pâle retrouva les couleurs de la vie et elle se releva. Les voleurs effrayés restèrent immobiles. La princesse se mit à parler: «Enfin, je me sens tellement mieux, comme si une lourde douleur venait de me quitter…»