L’Eglise protestante de Genève mise sur le non-cultuel

L'EPG augmente la part de ses effectifs en aumôneries, qui passe 16 à 25%. / IStock
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L'EPG augmente la part de ses effectifs en aumôneries, qui passe 16 à 25%.
IStock

L’Eglise protestante de Genève mise sur le non-cultuel

5 décembre 2023
En grandes difficultés financières, l’institution genevoise projette néanmoins de consolider ses missions d’utilité publique au service de tous, notamment au sein des prisons, dans les EMS ou les hôpitaux, auprès des requérants d’asile ou des SDF.

L’heure est à la projection pour l’Eglise protestante de Genève (EPG). Réunie en Consistoire les 30 novembre et 1er décembre, son assemblée législative a validé une nouvelle répartition des forces et des moyens pour 2024-2026.

A l’instar des autres Eglises réformées romandes, l’EPG subit en effet de plein fouet la pénurie de pasteurs. «Entre 2024 et 2026, l’EPG devra absorber un grand nombre de départs à la retraite: 10 EPT ministériels contre 3 arrivées prévues», indique Emmanuel Rolland, secrétaire général adjoint à la mission. Par ailleurs, l’institution affronte de grandes difficultés financières en raison de la diminution constante des dons (de particuliers et de fondations) – cette manne constituant sa seule ressource dans ce canton laïc où l’Eglise est totalement séparée de l’Etat.

Pour autant, alors que le mot d’ordre général est aux économies, l’EPG a décidé d’augmenter ses effectifs pour ses différentes missions d’utilité publique, soit au service de tous, à l’horizon 2026. «Nous avons décidé de renforcer les aumôneries, un secteur qui est en pleine santé», indique Emmanuel Rolland, secrétaire général adjoint à la mission. Ainsi, alors que la part des forces dévolues aux paroisses passe de 55% à 50%, que celle des ministères cantonaux et ceux dits «pionniers» (ministère Enfance, l’Antenne LGBTI, ministère web, etc.) se réduit également (de 29% à 25%), les forces engagées pour les aumôneries atteindront 25% contre 16% actuellement.

Des renforcements rendus possibles grâce à l’évolution des dons affectés en augmentation, et qui représentent aujourd’hui un quart du budget mission 2024 de l’institution (contre 18% en 2022). «Des fonds privés substantiels et généreux soutiennent nos missions hors église, soit les activités non-cultuelles de l’EPG», précise encore Emmanuel Rolland. «De plus, nous avons les ressources disponibles dans ce secteur, où nous ne connaissons pas de pénurie de personnel.»

Rôle social méconnu

Bien qu’ancrées dans la vie genevoise et son maillage social, ces différentes missions d’utilité publique de l’EPG sont encore méconnues du grand public. «A l’occasion d’une tournée des notaires dans le but de sensibiliser à la question du legs, nous nous sommes rendu compte que pratiquement personne ne sait ce que fait l’EPG», signale Joël Rochat, son trésorier. «Soit on ignore tout de notre rôle social, soit on croit que ces services sont réservés aux protestants.»

Les différents services d’aumônerie que propose l’EPG, le plus souvent en partenariat avec l’Eglise catholique, s’adressent pourtant à toute la population. Qu’il s’agisse d’accompagnement spirituel en hôpitaux ou EMS, à l’Université ou pour les SDF et les plus démunis, ou encore dans les prisons et les centres de détention pour les requérants d’asile. Sans oublier le Centre social protestant, l’Antenne LGBTI Genève ainsi que l'Office protestant de consultations conjugales et familiales (OPCCF).

Face à cette méconnaissance de ces actions, l’hypothèse d’une opération de grande ampleur dans l’espace public, afin de faire connaître ces activités non cultuelles au service de tous, a été évoquée. Si une telle communication semble nécessaire – et ce tant pour des raisons de bien commun que financières –, d’aucuns craignent une «publicité faite sur le dos des pauvres qui serait mal à propos». Un dilemme face auquel l’EPG devra inévitablement se positionner ces prochaines années.