Car, à l’image de Luther, qui quitte son monastère pour s’engager dans le monde, les protestants savent que la sainteté ne se vit plus à l’écart de la société, mais dans la vie de tous les jours. En effet, libérés du souci d’eux-mêmes, et de leur propre salut, ils sont libres de s’engager au service des autres. «Redresser, rendre juste: ce sont les mots clés de cet engagement…» indique le pasteur Jean-Pierre Thévenaz, cheville ouvrière de l’association romande Chrétiens au travail. Et d’ajouter: «C’est l’apport de l’Evangile: cette Parole entend toujours remettre debout les personnes menacées par les injustices.»

«C’est aussi une allusion au Royaume, une anticipation du redressement que Dieu opérera à la fin des temps», continue le ministre. Car le Royaume espéré doit inspirer notre pratique dans ce monde-ci: si l’amour et la justice n’y règnent pas, à nous de contribuer à les y instaurer.

La foi réformée pousse donc à la critique sociale. Car, en conscience, chacun peut juger de ce qui est conforme à la justice annoncée par le Royaume. Un esprit critique qui se traduit aussi en responsabilité politique: Calvin déjà développait une doctrine du «bon gouvernement», reposant sur des critères à la fois humains et divins.

«Quand l’autorité exploite, humilie, sacrifie, elle doit être critiquée. Pour l’apôtre Paul lui-même, la reconnaissance des autorités doit se faire ‹en conscience›», souligne Jean-Pierre Thévenaz. «C’est un héritage et un engagement dont nos Eglises réformées doivent se charger», plaide-t-il. Un engagement libre, qui place les protestant• es au coeur de la société.