Austères, les protestants?
Comme l’ancien Premier ministre français Lionel Jospin, lui-même protestant. Pour dissiper quelques idées reçues sur sa confession, il avait déclaré il y a une vingtaine d’années être «un rigide qui évolue, un austère qui se marre».
Car ce n’est pas qu’un stéréotype… L’austérité constitue bel et bien un trait de l’identité protestante. C’est Christian Grosse, professeur d’histoire et d’anthropologie des christianismes modernes à l’université de Lausanne, qui le dit: «Cela s’enracine dès le XVIe siècle dans l’exercice d’une discipline plus rigoureuse que dans le monde catholique.» L’Eglise réformée a ainsi longtemps réprimé la danse ou le jeu. «En Romandie, il n’y avait pas de réjouissances publiques», indique l’historien.
Dix Commandements
La Réforme veut marquer un retour aux sources bibliques, à la pureté originelle. Les comportements étaient réglés sur les Dix Commandements, dont le texte scripturaire était souvent la seule décoration aux murs des églises. Un message moral fort qui crée cette sobriété. «On avait une vie plus sévère. On portait des vêtements moins colorés, ne dévoilant pas le luxe… C’est devenu une marque identitaire», détaille Christian Grosse. L’idée a ensuite été rechargée au XIXe siècle, notamment dans les milieux des Eglises libres, particulièrement rigoristes.
Ce qu’il en reste aujourd’hui, dans nos sociétés métissées? «Une sensibilité pour la simplicité, par exemple dans l’esthétique. Cela reste structurant pour ceux et celles qui héritent de cette tradition», selon Christian Grosse. Et de conclure: «C’était en partie un mythe, mais un mythe auquel les protestant∙es se sont raccroché∙es…»