La tombe est devenue un lieu de recueillement éphémère
«La désaffectation d’une parcelle d’un cimetière consiste à enlever uniquement ce qui est en surface, c’est-à-dire les monuments comme les pierres tombales. On ne touche pas aux restes mortels. Par contre, on retire les urnes. Le terrain est ensuite nivelé, de l’herbe ressemée et la parcelle laissée au repos pendant plusieurs années», explique Jean-Pierre Sanga, responsable de l’Office des inhumations et des incinérations de Lausanne.
Les tombes à la ligne –placée côte à côte sur un terrain– qui contiennent des corps peuvent être désaffectée à partir de 25 ans, après la dernière inhumation. Pour les tombes cinéraires ou les niches, ce processus peut avoir lieu après 15 ans, stipule le Règlement sur les décès, les sépultures et les pompes funèbres du canton de Vaud (RDSPF). Quant à la désaffectation des concessions, elle ne peut être réalisée qu’à leur échéance. Et le public doit en être averti au moins six mois à l’avance par voie de presse.
«Après 25 ans, le corps est en principe décomposé. Lorsqu’une tombe est nouvellement creusée et qu’apparaissent des ossements, ces derniers sont retirés et déposés dans un ossuaire, comme le prévoit le règlement cantonal», précise le responsable. L’emplacement de l’ossuaire à Lausanne n’est ni monumental ni particulièrement visible. «Lors de la désaffectation des tombes à la ligne, nous informons par lettre uniquement les personnes qui nous en ont fait une demande explicite. Par contre pour les concessions qui arrivent à échéance, nous prévenons chaque titulaire, ou le successeur de ce dernier dans la mesure où il s’est fait connaître. En plus d’avertir le public par voie de presse, nous placardons des avis aux abords des secteurs du cimetière et des tombes.»
Récupérer l'urne
«Personne ne m’a informée de la désaffectation de la tombe de mon mari et comme je ne lis pas la feuille des avis officiels, je n’étais pas au courant», se rappelle Geneviève Weissbrodt, septentenaire dont l’époux est décédé en 1992. A Pully, les tombes cinéraires durent 20 ans et ne sont pas renouvelables. «C’est ma cousine qui avait un proche dans le même cimetière qui m’en a parlé. J’ai tout de suite téléphoné pour pouvoir récupérer l’urne, la pierre tombale et le marbre», explique-t-elle déplorant qu’on ne l’ait pas informée personnellement. Si personne ne se manifeste, les cendres sont versées au jardin du souvenir.
Geneviève Weissbrodt a remis en terre l’urne de son époux dans le cimetière d’Ecublens, commune où elle habite actuellement. «Entre l’ajustement de la pierre tombale et l’emplacement, cela m’a coûté environ 800 francs», ajoute cette mère de trois enfants et grand-mère de six petits-enfants. «Je suis très contente d’avoir pu récupérer l’urne. Lors de sa remise en terre, nous avons fait une petite cérémonie. C’était important, surtout pour mes petits-enfants afin qu’ils sachent où se trouve leur grand-père», ajoute-t-elle.
Garder les ossements
Récupérer l’urne se trouve être une démarche plutôt rare, selon les observations de Jean-Pierre Sanga. «Si la plupart des personnes contactées par lettre nous téléphonent pour savoir comment agir, la majorité d’entre elles décident de ne pas donner une suite à la tombe.» Encore moins courante, la récupération des ossements est une démarche possible. Selon le RDSPF, après extraction, les ossements peuvent soit être transférés dans une concession dans le même cimetière, soit être incinérés et remis aux proches. Mais les restes mortels peuvent aussi être transportés dans le cimetière d’un autre canton ou d’un autre pays sur autorisation de la commune moyennant une attestation écrite donnée par le lieu de destination.