Les paroisses se mettent en marche
Un bol d’air destiné à faire découvrir la campagne de carême en lien avec le gaspillage des énergies. C’est ce que proposaient en mars dernier les pasteurs stagiaires de l’arrondissement jurassien des Eglises réformées Berne-Jura-Soleure. Cinq kilomètres ponctués de haltes ludiques et méditatives qui ont attiré près d’une centaine de personnes aux Franches-Montagnes (JU) pour l’occasion, parfois de très loin. «C’était un moyen de proposer quelque chose de différent à des personnes qui ne fréquentent pas forcément les activités d’Eglise, une manière de se retrouver après deux ans de pandémie et de se reconnecter à soi et à la nature», souligne Quentin Jeanneret, alors pasteur stagiaire à la paroisse de Haute-Birse et désormais pasteur à la paroisse de Moutier.
Le projet était soutenu par l’initiative «Eglise en route», regroupant les différents services de l’arrondissement, qui vise à créer et soutenir des projets novateurs: «Nous voulons stimuler les activités hors les murs qui favorisent la rencontre avec une dimension spirituelle et écologique et qui soient accessibles au plus grand nombre», précise Romain Jacot, animateur jeunesse de l’arrondissement, également impliqué dans le projet. Pour lui, qui a cheminé sur le parcours avec sa femme et ses trois enfants, le fait que l’activité soit adaptée aux familles est un point très important.
Se mettre en mouvement est un critère fondamental de l’initiative «Eglise en route»: «Il ne s’agit pas forcément de soutenir seulement des projets qui nécessitent une certaine forme physique ; mais les initiatives qui font bouger permettent de créer une dynamique intéressante que l’on ne retrouve pas ailleurs. Dans notre tradition, nous restons souvent assis à écouter, ce qui ne parle pas toujours à tout le monde», ajoute le pasteur Jean-Luc Dubigny, président de la commission Terre Nouvelle, et cheville ouvrière d’«Eglise en route». Cet été, la seconde édition d’une course à vélo rassemblant de jeunes migrants et des jeunes de la région sera soutenue. Elle se déroulera sur plusieurs jours et fera halte dans différentes paroisses entre Berne et le Jura bernois qui proposeront gîte et couvert.
Héritages pandémiques
Du côté du Val-de-Travers (NE), la pasteure Véronique Tschanz Anderegg, également guide de moyenne montagne, a favorisé les sorties en extérieur durant la pandémie. Ses «Médita-balades» ont permis à de nombreuses personnes de se retrouver, malgré les restrictions sanitaires, pour un moment de partage et de spiritualité. Elle a par ailleurs effectué une grande partie de ses visites pastorales en marchant, dont des visites de deuil. «Il faut dire que la région se prête particulièrement aux randonnées en plein air dans un cadre intimiste.
De plus, la nature nous offre quantité de symboles avec lesquels nous pouvons interagir dans une méditation ou une discussion», ajoute la pasteure, qui continue de proposer certaines visites en marchant. Les balades ainsi que des cultes en randonnant, déjà organisés avant la pandémie, se poursuivront bien sûr aussi.
Dans la région de Delémont, l’animatrice jeunesse Annick Monnot a proposé une série de marches intitulées «Monts et merveilles». Ces randonnées, ponctuées de haltes méditatives avec textes bibliques, contemplation de paysage ou moments de partage, ont également rencontré un beau succès. Impliquée dans les démarches de transition intérieure, l’animatrice a voulu avant tout miser sur le positif: «Face au changement climatique, il est parfois difficile de s’émerveiller, alors que la nature nous offre d’incroyables panoramas qui ne peuvent que nous redonner espoir.» Les activités jeunesse reprenant de plus belle, à la suite des levées des restrictions sanitaires, Annick Monnot n’aura malheureusement plus le temps d’organiser elle-même ces marches, mais n’exclut pas qu’elles continuent sous une autre forme.
Validation institutionnelle
Du côté de l’Eglise réformée vaudoise, le diacre Renaud Rindlisbacher, qui propose des marches intitulées «Au rendez-vous de la nature», a pu bénéficier du soutien direct de la plateforme Transition écologique et sociale (TES), qui intègre l’activité dans son offre nature et spiritualité. Il propose plusieurs concepts adaptés à différents publics. Les familles sont à l’honneur avec des randonnées accessibles aux petits pieds ainsi que des «Bols d’air» les mercredis après-midi. Pour les adultes, des marches plus exigeantes avec méditation, haltes contemplatives et échanges sont au programme, avec, chaque fois, le souci de s’adapter au groupe. Pour Renaud Rindlisbacher, ces sorties correspondent à une véritable vocation: il est actuellement en formation d’accompagnateur en montagne et pratique la photographie animalière, activité pour laquelle il a développé une grande patience dans son affût, en vue du cliché unique.
Pour les plus assidus
Celles et ceux qui souhaiteraient une expérience plus poussée peuvent rejoindre le pasteur de l’Eglise protestante de Genève Alexandre Winter, lequel s’est joint à la retraite ignacienne proposée par l’Eglise catholique pour offrir une activité oecuménique. Inspirée de l’encyclique Laudato Si’ du Pape François, qui prône une écologie intégrale, la marche part du Flueli-Ranft (OW) et rejoint l’abbaye d’Einsiedeln. Elle se fait en grande partie en silence avec des temps d’échanges en soirée. Chaque matin, des textes bibliques, méditatifs ou des poèmes sont exposés aux participantes et participants, qui peuvent les faire résonner en eux durant la journée, en lien avec les panoramas exceptionnels traversés tout au long des chemins de montagne.
Déblocage spirituel
Selon la pasteure Karin Phildius, qui propose également des marches dans le cadre de la paroisse de La Chaux-de-Fonds, ces propositions d’Eglises ne sont pas qu’une offre annexe, mais cristallisent une réflexion de fond: «De nombreuses personnes peinent à simplement franchir la porte de l’église, se disant que ce n’est pas pour elles. Le fait de pouvoir leur proposer une activité où elles ne se sentent pas enfermées permet de créer une certaine ouverture.» La pasteure est convaincue que le fait de partager une expérience liée à une dimension spirituelle, que cela soit au travers de la marche ou d’une autre activité qui favorise le partage, est primordial. Dans les marches qu’elle propose, toutes et tous ne sont pas des piliers de la paroisse. Des personnes rencontrées dans le cadre de ses différentes activités ou des curieux qui se disent intéressés par la démarche sont également de la partie. Le résultat: un échange pas forcément convenu où les expériences de vie se partagent pour déboucher sur des liens noués en toute simplicité. Une manière de faire tomber certaines barrières d’un côté comme de l’autre. La pasteure développe une offre plus conséquente pour la rentrée d’automne, au départ de la Vue des Alpes (NE).
De nombreuses paroisses proposent bien sûr encore d’autres marches et randonnées qui méritent le détour. N’hésitez pas à feuilleter les agendas pour dénicher celle qui vous conviendra le mieux dans votre région.