Fribourg: «On ne construit pas nos liens sur la protestation et la revendication»

Le Grand Conseil fribourgeois a adopté, ce vendredi 22 mars, la modification de la Loi concernant les rapports entre les Eglises et l'Etat, la rebaptisant par la même occasion «Loi concernant les rapports entre les communautés confessionnelles et l'Etat (LRCCE). / IStock
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Le Grand Conseil fribourgeois a adopté, ce vendredi 22 mars, la modification de la Loi concernant les rapports entre les Eglises et l'Etat, la rebaptisant par la même occasion «Loi concernant les rapports entre les communautés confessionnelles et l'Etat (LRCCE).
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Fribourg: «On ne construit pas nos liens sur la protestation et la revendication»

Anis Achour, secrétaire général de l’Association des musulmans de Fribourg (AMF), réagit à l’adoption de la nouvelle loi régissant les liens entre Etat et communautés religieuses dans ce canton.

Le Grand Conseil fribourgeois a adopté, ce vendredi 22 mars, la modification de la Loi concernant les rapports entre les Eglises et l'Etat, la rebaptisant par la même occasion «Loi concernant les rapports entre les communautés confessionnelles et l'Etat (LRCCE), du fait de son ouverture à d’autres groupes religieux. Si les débats ont été tendus, et ce majoritairement autour de la question sensible de l’accès des communautés musulmanes à ces nouveaux droits – lesquels et sous quelles conditions –, cette révision a été acceptée à une large majorité: 81 voix pour, contre 13 contre et 0 abstention. Réaction de l’Association des musulmans de Fribourg (AMF), par la voix de son secrétaire général Anis Achour.

Comment votre association prend-elle la décision du Grand Conseil?

Nous prenons au sérieux cette décision: nous sommes très sensibles à toute parole ou action qui reconnaît à la fois notre appartenance spirituelle et notre engagement citoyen. Dépasser les préjugés est un principe fondamental dans notre perception spirituelle.

Comptez-vous déposer une demande?

Oui je pense, mais dans la bonne entente et la satisfaction. Nous restons à l’écoute et ouverts au dialogue.

Quels sont les droits qui vous semblent les plus importants à acquérir?

Il n’y a pas un droit spécifique. Chaque pas qui mène à agir sur soi-même et qui met en valeur l’autonomie de la communauté musulmane est le bienvenu. Ainsi que toute procédure qui construit des liens sur la base du respect et de la confiance. 

Avez-vous néanmoins un regret concernant le texte qui a été adopté, que cela soit au niveau des prérogatives accordées que des conditions posées?

Il n’y a pas de regret. Ceux qui veulent porter de l’espoir dans notre temps présent n’ont rien à regretter. Nous ne sommes pas une communauté politique et on ne construit pas nos liens sur la protestation et la revendication.

Comment vivez-vous le fait que les débats aient été aussi vifs, avec notamment certains propos méfiants par rapport à l’islam ?

C’est normal d’avoir un débat vif, c’est un signe qu’il y aura encore du travail à faire, notamment en ce qui concerne la communauté musulmane. Notre communauté doit aller un peu plus loin encore: vers davantage de participation, d’ouverture et d’écoute aux attentes de nos concitoyens ainsi que de nos coreligionnaires . 

Pas le lieu où parler de radicalisation

Un dernier amendement, déposé par le député socialiste Grégoire Kubski ce vendredi lors de la deuxième lecture, avait cependant encore polarisé l’assemblée. Il demandait que soit clairement inscrite dans la loi le fait que «le Conseil d’Etat peut mandater des aumôniers de communautés non reconnues afin de répondre à un intérêt public au sein des établissements publics». Mais également aussi que «le Conseil d’Eat prend des mesures pour lutter contre la radicalisation dans les établissements publics et dans le canton».

Deux propositions qui ont été dépeintes comme «superflues» par le représentant du gouvernement ainsi que le rapporteur de la majorité, étant donné que des aumôniers musulmans sont déjà mandatés à l’occasion dans les établissements pénitentiaires, notamment à Bellechasse. Quant à la question de la radicalisation, «celle-ci est déjà prise en charge par le Plan national de lutte contre la radicalisation», rappelle le rapporteur Savio Michellod (PLR). Si tous les députés se sont accordé sur la nécessité de tout mettre en place pour combattre ce phénomène, les avis divergeaient quant à la pertinence de légiférer sur ce point dans le cadre de texte. Au final, l’amendement a été refusé au fil du rasoir par 48 voix contre, 47 pour et 2 abstentions.

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Anis Achour, secrétaire général de l’Association des musulmans de Fribourg (AMF)
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