Accompagner la spiritualité des sportif·ves

Alessandra Maigre / © Eglise catholique, canton de Vaud
i
Alessandra Maigre
© Eglise catholique, canton de Vaud

Accompagner la spiritualité des sportif·ves

Alessandra Maigre
On connaît les aumôniers d’hôpital ou de prison, mais peu d’outils existent pour accompagner les sportifs et sportives sur le plan spirituel. C’est ce manque qu’a voulu combler Alessandra Maigre.

Chercheuse mais aussi hockeyeuse, Alessandra Maigre s’est toujours intéressée aux nouvelles spiritualités et à la manière dont les Eglises pouvaient les rejoindre. Après un bachelor en théologie à l’Université de Genève, l’étudiante catholique et œcuménique a poursuivi sa réflexion en théologie pratique sur le manque d’études concernant l’aumônerie sportive à l’Université de Fribourg, aiguillée par le professeur Olivier Bauer. Cinq ans plus tard, la Genevoise a finalisé une thèse sur le sujet. 

Quelle a été votre interrogation initiale? 

Je voulais comprendre comment la spiritualité s’exprime dans le milieu du sport. Mais l’idée était d’élargir cette réflexion à d’autres milieux, par exemple artistiques, où bien des environnements sont soumis à des nécessités de performance ou à de fortes pressions comme le vivent les sportifs d’élite. L’enjeu était de mieux appréhender la spécificité des milieux sportifs. 

Et votre méthodologie? 

J’ai choisi de ne pas faire d’enquête de terrain, mais au contraire de poser des jalons théoriques, car cette recherche n’existe ni en Suisse ni dans le champ francophone. J’ai pris en considération les travaux réalisés dans les pays limitrophes de la Suisse et dans les pays anglo-saxons. Et j’ai corrélé cela avec une réflexion théologique. Je me suis aussi appuyée sur des recherches de terrain existantes, notamment en Angleterre. 

Développer une «spiritualité de la transcendance» pour accompagner les sportifs d’élite.

Votre principale découverte? 

La spécificité de l’univers sportif, c’est la notion de performance, d’aller plus loin, de se dépasser. Une attitude spécifique pour accompagner les sportifs d’élite serait donc de développer ce que j’appelle une «spiritualité de la transcendance», dans le sens où l’on est toujours tendu vers autre chose. Enfin, une des dimensions importantes engagées dans le sport est l’identité de la personne, ou sa vocation si l’on utilise un terme théologique. Un sportif ou une sportive possède une vocation à se dépasser. Celle-ci est englobée dans une autre vocation, humaine qui permet de définir sa place dans le monde. Et enfin en lien avec une potentielle autre vocation, spirituelle cette fois. Cette dernière englobe toutes les autres, c’est notre rapport à l’ultime, ce qui fonde toute vie. 

Les sportifs et sportives connaissent donc des conflits de vocation? 

En pratique, oui. Tout l’enjeu pour un sportif focalisé à 200 % sur son sport, c’est sa manière de comprendre sa vocation sportive: est-elle son unique engagement? Mais que se passe-t-il en cas de blessure, de non-sélection, d’échec? L’enjeu dans l’accompagnement spirituel est de pouvoir aider la personne à avoir une vision plus englobante de ses facettes identitaires, ou vocations. 

Quelles applications concrètes à ce travail? 

Mon approche est ouverte à toutes les confessions, à toutes les religions, même si je parle avec un ancrage chrétien. Pour le moment, rien de structuré ni d’œcuménique n’existe en Suisse romande. Mais, à terme, je pense qu’une aumônerie nationale, comme celle de l’armée, pourrait être imaginée, ouverte à toutes les confessions et fédérée au niveau suisse.