L’Espérance à tout prix, tel est le titre du dernier ouvrage du théologien neuchâtelois Pierre de Salis, qui décortique en détail la lettre du Nouveau Testament la plus diffusée de l’Antiquité. Cette lettre s’adresse aux chrétiennes et chrétiens disséminés dans plusieurs provinces de l’Empire romain – qui correspondent à la Turquie actuelle – et exhorte à ne pas perdre espoir malgré l’angoisse, la souffrance et l’isolement. «C’est une lettre d’une étonnante modernité du fait qu’elle s’adresse avant tout aux individus, ce qui est très particulier pour l’époque», souligne Pierre de Salis. Pour lui, le texte invite à voir dans l’espérance une boussole dont l’aiguille s’affole en permanence en raison de tout ce qui se passe dans le monde, mais qui résiste à l’agitation en gardant avec persévérance son cap.

Aujourd’hui, la question de l’espérance occupe également une place cruciale. La crise sanitaire mondiale, le réchauffement climatique et une nouvelle guerre en Europe ne font que renforcer l’incertitude dans un avenir des plus pessimiste. Un contexte dans lequel un dialogue avec cette première lettre de Pierre trouve tout son sens. «Le texte nous invite à ne pas démissionner. Espérer, c’est renouer avec la perspective d’une issue favorable», note Pierre de Salis. Le théologien fait également un parallèle entre les destinataires de cette lettre de l’époque, disséminés comme de petits îlots, et notre société actuelle tendant à perdre ses références communes qui contribuaient auparavant à sa structure. «On peut bien sûr penser aux Eglises qui perdent de leur influence dans une société qui se sécularise, mais le phénomène est bien plus large.

Dans son essai intitulé L’Archipel français – Naissance d’une nation multiple et divisée, paru en 2019, le politologue Jérôme Fourquet parle de la perte de la ‹matrice catho-républicaine› qui a pour résultat un éclatement complet de la société révélant un archipel d’îles qui s’ignorent les unes les autres.»

Bien que le message véhiculé par la première lettre de Pierre puisse être relu d’une manière universelle, il se base toutefois sur des valeurs chrétiennes fondamentales. L’ensemble du texte exhorte à faire le bien malgré tout et comporte une réflexion exigeante, riche, remplie de perles de spiritualité, en lien avec la foi, l’espérance et l’amour. Il place la foi au-dessus des biens matériels, de l’or et de l’argent, et invite à s’aimer les uns les autres. Le tout en encourageant la vie en société, le juste comportement à adopter avec les autorités politiques et la communauté et en soulignant l’importance de rendre compte de l’espérance qui anime les croyantes et les croyants. Un appel à s’engager lucidement en faveur d’un monde meilleur.