Mettre en mots ce qui nous arrive
Laurent Amiotte-Suchet est spécialiste des questions religieuses, il a entre autres mené des recherches sur les conséquences du vieillissement dans les communautés monastiques (voir Réformés de juin 2021). Responsable d’un enseignement sur le thème «Soins, croyances et spiritualités», conçu pour les futurs infirmières et infirmiers, il s’interroge sur un retour de la question de la spiritualité dans les soins – après une séparation causée par la sécularisation.
Pourquoi avoir conçu une formation courte?
Nous observons un intérêt des acteurs de la santé sur ces sujets. Nous sommes passés d’une période où les soignant·es considéraient que les questions spirituelles ne relevaient pas de leurs compétences à une période où cette dimension leur semble parfois omniprésente, alors qu’ils et elles sont en première ligne dans le contact avec les patient·es. Cette formation a donc un objectif de sensibilisation. Elle s’adresse aux soignants déjà en activité, aux accompagnants spirituels, aux visiteurs de malade intégrés à une pastorale de la santé… Toute personne qui se situe dans une démarche de contact et de suivi d’une personne malade.
Quelle est votre approche?
Nous voulons permettre aux participants de mettre en perspective ces questions sous différents angles. Ils doivent d’abord mieux connaître et comprendre l’évolution du paysage religieux. Les croyances sont de plus en plus individualisées. Beaucoup de personnes, tout en demeurant attachées aux doctrines des institutions religieuses, élaborent leur propre système de croyances. Et il importe également de leur permettre de se situer dans une approche anthropologique de la maladie. La médecine conventionnelle se focalise essentiellement sur les symptômes et les traitements. Mais pour les personnes malades, c’est souvent la question du «pourquoi» qui les taraude. Pourquoi cela m’arrive-t-il à moi? Comment mettre en mots ce qui m’arrive?
Aujourd’hui, même les personnes en bonne santé ont besoin de comprendre, procèdent à cette «mise en sens» de leur corps et de leur santé. Cela permet de retrouver un pouvoir d’agir, le sentiment de ne pas être uniquement dépendant du corps médical et des traitements. Enfin, nous aborderons aussi dans cette formation les outils et pratiques permettant d’évaluer les besoins spirituels des personnes. Mais également les nouveaux agencements existant dans les dispositifs de soins: formations Spiritual Care pour les infirmiers, rôle d’assistant spirituel confié aux aumôniers, dans une approche non confessionnelle…
Est-ce qu’on guérit mieux quand nos croyances sont prises en compte?
La spiritualité des personnes malades peut autant être une source d’espoir qu’une source de difficulté, conduisant à une détresse spirituelle. Il faut donc la prendre au sérieux sans pour autant y voir trop vite une certitude apaisante face à l'incertitude de ce qui arrive. Je n’affirmerais donc pas qu’intégrer la question spirituelle dans la prise en soins améliore la santé des personnes. Mais il est très important aujourd’hui d’adopter une approche globale, en prenant en compte toutes les dimensions de la personne pour mieux l’accompagner dans sa quête de santé. Cela inclut donc aussi les convictions ou les questionnements spirituels.
Le cours
«Croyances soignantes vs soignantes croyances: la spiritualité dans les soins». Formation de trois jours à l’HESAV, les jeudis 7 mars, 21 mars et 4 avril.
Inscription jusqu’au 22 février sur www.hesav.ch/formation.