Depuis le début de l’année, Réformés vous a proposé un dossier sur la question de l’enseignement du fait religieux, suivi d’une série de reportages dans différentes écoles romandes (www. reformes.ch/ecole). Cette question faitelle l’objet d’un consensus politique ? Trois directrices et directeur cantonaux de l’instruction publique ont répondu à nos questions.

«A l’occasion de l’introduction d’une nouvelle leçon d’éducation numérique à la grille-horaire de l’école primaire, les partenaires scolaires ont été interrogés sur l’éventualité de supprimer la leçon d’histoire des religions. Une large majorité des partenaires interrogés n’ont pas retenu cette proposition. De façon générale, on peut affirmer que l’enseignement du fait religieux est bien admis culturellement», constate Martial Courtet, ministre jurassien de la Formation de la Culture et des Sports. 

«Au vu de sa tradition de laïcité, le canton de Genève n’est jamais entré dans cette démarche visant à mettre en place un cours spécifique d’éthique et cultures religieuses», rappelle Anne Emery-Torracinta, conseillère d’Etat à la tête du Département de l’instruction publique. Elle promet toutefois: «mais la laïcité, ce n’est pas nier le fait religieux. Les savoirs et compétences en matière de religion sont transmis dans d’autres cours, notamment en histoire». Avec le risque que ces enseignements soient les premiers auxquels l’on renonce lorsque l’on peine à boucler le programme? «Les élèves reçoivent un manuel spécifique et cela fait clairement partie du programme», rétorque l’élue. «Mais je crois que de ne pas faire de cet enseignement une branche spécifique, cela dédramatise les choses. Nous les présentons comme des savoirs comme les autres: les religions font partie de la vie en communauté. Il n’est pas question de demander à en être dispensé, par exemple.» Un équilibre qui, à Genève aussi, devrait perdurer: «Avec les institutions internationales et les multiples cultures qui vivent à Genève, nous avons une longue tradition qui allie libertés religieuses et neutralité de l’Etat en matière de religion. Et franchement, ça fonctionne plutôt bien s’il faut résoudre parfois un cas spécifique. Dans l’ensemble, tout le monde comprend qu’une élève, en tant qu’usagère, a le droit de porter un voile en classe, mais qu’une enseignante, en tant que représentante de l’Etat, ne le peut pas.» 

En revanche, pour Martial Courtet, «la croyance de l’enseignant∙e comme celle de chacune et chacun n’est pas un sujet tabou à l’école, mais la prise de parole sur des croyances, par exemple sur l’au-delà, ne peut se faire que si un travail sur la complexité et la notion de point de vue sont clairement travaillés en classe. Il s’agit que chacune et chacun sache situer sa prise de parole et celle de l’autre. Parle-t-il au nom d’un JE (ma subjectivité)/d’une communauté de croyance/d’une connaissance universellement partagée (objectivité)? Cette compétence est plus que jamais à développer à l’heure des réseaux sociaux et un enseignement d’ECR peut y jouer un ‹sacré› rôle!», sourit-il. «Les objectifs sont élevés dans cette matière», rappelle Cesla Amarelle, conseillère d’Etat vaudoise à la tête du Département de la Formation, de la Jeunesse et de la Culture. «Les élèves doivent apprendre à se situer dans leur culture et connaître les autres cultures. Ils doivent développer des compétences éthiques leur permettant de décrypter et de contextualiser des débats tant lorsqu’il s’agit de question de société que de conflits internationaux. Ils travaillent aussi le rapport au texte et doivent différentier lecture littérale ou symbolique.»