Le coronavirus fait déprimer les plus jeunes
Comment éviter à une génération de basculer dans la déprime? Quelques conseils.
L’arrivée de la pandémie? «C’était presque un soulagement, des sortes de vacances! On n’allait pas au gymnase, les profs étaient pris au dépourvu. On était chez nous, libres de faire ce qu’on voulait», se souvient Noémi, gymnasienne vaudoise de 16 ans. L’été? «C’était l’éclate, la fête, on pensait que c’était fini pour tout le monde.» Puis les nouvelles restrictions, «en novembre, ça a commencé à devenir difficile». Et là? «C’est la descente aux enfers», avoue-t-elle tout de go. La plupart des jeunes vivent comme une pression «cette incertitude constante de se dire ‹à quand notre tour d’être reconfinés?› […] On n’est jamais sûrs de ce qui va se passer. Or on est à un âge où l’on a besoin d’avenir, de plans, de projets. Et là, tout est complètement mort», constate Noémi.
La souffrance psychique des ados et des jeunes due à la pandémie est aujourd’hui clairement constatée. Les tentatives de suicide tout comme les hospitalisations en pédopsychiatrie ont augmenté, constatent des professionnels romands relayés par la RTS. Pro Juventute Vaud enregistre plus d’appels au 147, des situations plus lourdes. Les heures passées par les ados sur leurs smartphones ont parfois triplé selon une étude mandatée par Swisscom. Comment réagir?
Ressources en ligne
Le Centre social protestant – Vaud, à travers son service social pour jeunes «Jet Service», a mis en ligne une boîte à outils pleine de réponses concrètes sur plusieurs thèmes: bourses d’études, apprentissage, finances, besoin de parler… Jet Service est conscient de la difficulté de cette période hors norme. «Ne pas savoir quand tombera une bourse ou une aide pour un loyer est la chose la plus pesante. Comment vivre avec des dettes ou fonctionner avec l’incertitude? Nous essayons de trouver des moyens pour des consultations auprès de psychologues pour les jeunes qui en ont besoin, mais n’en ont pas les ressources», explique Alev Ucar, travailleuse sociale.
Se rencontrer
En Église, certains groupes de jeunes ont décidé de maintenir les rencontres présentielles. «Rapidement, les jeunes en ont eu marre du virtuel. Dès cet automne, d’un accord unanime, nous avons organisé de petits groupes pour continuer à se voir en respectant les normes», raconte Vincenzo Ravera, responsable jeunesse auprès de la paroisse réformée du Mont-sur-Lausanne. Pour cet animateur, la formule est payante. «En petits groupes, les gens sont obligés de se dévoiler, de répondre aux questions, de réellement faire connaissance. On parle bien plus!» Maintenir ce cercle était pour lui primordial. «L’adolescence est l’âge où il faut apprendre à tisser des liens hors de la famille, sortir de ce milieu sécurisé pour apprendre à se socialiser ailleurs.»
Garder le lien
A contrario, d’autres ont décidé d’intensifier les échanges virtuels, afin d’éviter à tout prix la solitude. Pro Juventute met en avant son peer chat, qui permet de chatter avec des jeunes de son âge ayant traversé des situations difficiles, anonymement (www.147.ch). L’Antenne LGBTI du LAB (www.LeLab.church) de l’Église protestante de Genève a développé une offre à distance adaptée, avec entre autres des rencontres virtuelles toutes les deux semaines, qui «offrent un espace pour parler et s’exprimer», explique Adrian Stiefel, responsable de l’antenne. Mais aussi du speed phoning, soit de la mise en contact de personnes qui ne se connaissaient pas «pour créer de nouvelles occasions de rencontres et d’échanges» à une époque où celles-ci sont devenues plus que compliquées. Un seul mot d’ordre: garder le lien, et maximiser les possibilités d’échanges. Car bien d’autres jeunes partagent le vécu de Noémi qui se dit «totalement chamboulée», tout juste «rythmée par un instinct de survie». «Le monde dans lequel je vis me fait peur.»