La part des anges
Les anges apportent une touche merveilleuse au récit de la nativité de Luc, mais leur intervention nous pose un problème moderne: nous faut-il croire aujourd’hui à la manifestation surnaturelle de ces êtres de lumière?
Pour interpréter le récit de Luc 2, il ne s’agit pas de considérer le miracle de l’apparition des anges comme un fait objectif et mesurable. Je n’irais pas dans cette direction.
Quelle piste proposez-vous pour nous aider à comprendre le récit?
Les bergers vivent un événement qui les dépasse complètement, ils sont bouleversés, apeurés. Ce qui compte, c’est que cet événement est suffisamment saisissant pour les mettre en mouvement ! Ils quittent leurs champs et se mettent activement à la recherche de l’enfant. Je souligne donc que pour Luc, c’est avant tout la Parole de l’ange qui est l’événement annonciateur de l’Evangile (cf. encadré). Les bergers deviennent les premiers témoins de la Bonne Nouvelle: ce sont eux qui annoncent à Joseph et Marie «ce qui leur a été dit au sujet de l’enfant» (Luc 2,17).
Et quel parallèle pouvons-nous faire avec notre propre vécu?
Nous ne pouvons pas dire qu’au XXe siècle, nous n’avons plus d’anges. Ce texte témoigne que nous sommes face à une Parole extérieure qui provient de «quelque chose» que nous ne maîtrisons absolument pas. Ce «quelque chose» advient et aussitôt échappe. La Parole est une expérience de l’ordre de la rencontre qui crée en nous la foi.
Vous n’excluez donc pas l’expérience du merveilleux?
En effet, je ne balaierais pas le merveilleux, si par merveilleux on entend quelque chose qui échappe à notre dimension. C’est une façon de parler de la révélation et de la foi. Il s’agit de la rencontre avec Dieu et avec le Christ. Les anges nous disent ce que signifie l’événement de Noël: Le nouveau-né emmailloté dans une mangeoire est la présence de Dieu parmi les hommes. Jésus n’est pas venu divulguer un nouvel enseignement à l’humanité, il est lui-même l’événement de la Parole de Dieu.
Et cette Parole, comment pouvons-nous la saisir?
On ne saisit pas la Parole, on la reçoit, sans cesse de nouveau. Elle est l’événement d’une rencontre, d’une reconnaissance mutuelle entre Dieu et moi. Il ne s’agit jamais d’un discours mondain adressé à tous, par exemple sur l’amour, la fraternité ou le don. Tout cela, c’est de la morale. Or, il s’agit d’une relation interpersonnelle. Jésus reconnu Christ, à la mangeoire ou ailleurs, est lui-même cette Parole, cet événement de la présence de Dieu dans l’existence du sujet croyant.
La Parole de l’ange
«Soyez sans crainte, car voici, je viens vous annoncer une bonne nouvelle, qui sera une grande joie pour le peuple: Il vous est né aujourd’hui, dans la ville de David, un Sauveur qui est le Christ Seigneur; et voici le signe qui vous est donné: vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire.»
Evangile de Luc 2, 10 - 12.