Je vais vous confier quelque chose que peu de gens savent… Il y a deux choses que je fais systématiquement avant d’entrer sur scène. Que ce soit dans un théâtre, en plein air, dans un temple ou sous un chapiteau et quelle que soit l’histoire qui va se raconter: je dis le Notre Père. C’est une connexion essentielle à ce «Dieu» qui me précède. Je sais que je suis dans sa main, que je suis portée et que ma présence, là où je me trouve à cet instant T, a un sens. La seconde chose? Gardons-la encore un peu dans le pli secret des coulisses.

Les paroles du Christ me touchaient déjà durant mon enfance en Argentine. Adolescente, tout juste débarquée en Suisse, elles résonnaient dans mes questions et ma recherche de justice. Aujourd’hui adulte, parler de ma foi est un exercice plus complexe. Aux mots, je veux privilégier l’action. Aux déclarations, je choisis le jeu, le mouvement et l’échange. Le vivant dans le Vivant. La liberté d’être, le plus pleinement possible et en lien avec les autres. Tout cela comme chant de reconnaissance à cet Amour immense qui est Source de toute vie. J’ai sauté dans le théâtre comme on saute dans l’Evangile, le coeur plein. Et ils se rejoignent si bien! En cela qu’ils sont tous deux un mouvement vers l’autre et une mise en marche de soi. «Va!»

Engagée dans de multiples collaborations artistiques, ecclésiales ou interculturelles, il en est une qui occupe une place particulière dans mon coeur: avec mon compagnon Pierre-Philippe Devaux, comédien lui aussi, nous sommes envoyé·es à Madagascar par DM afin de travailler avec les enfants d’écoles primaires au renforcement de leur français à l’oral. A travers l’animation d’ateliers de théâtre, nous les accompagnons dans cet apprentissage et soutenons les enseignant·es dans leur formation.

Me rendre à Madagascar est une réponse logique à cet appel de ma foi. Je l’ai appris dès ma petite enfance avec des parents qui s’engageaient eux-mêmes auprès des plus petits et des plus faibles de notre ville. Lors de notre expérience avec les enfants, nous sommes entré·es dans le pays de l’imaginaire. Ils sont devenus d’étonnants raconteurs d’histoires! Ils ont joué les histoires de la Bible et voilà que leurs yeux, leurs voix, leurs corps et même leurs silences nous parlent de nous et de notre relation à Dieu. Nous avons été impressionné·es par la force de chacune des personnes que nous avons rencontrées. Chaque enfant est une tranche pure d’Evangile à vie ouverte. C’est d’eux que nous avons tant appris!

Pendant deux ans, nous ferons plusieurs séjours de courte durée. Durant notre prochain voyage, de mi-mars à mi-avril, nous serons accueillis dans les écoles FJKM à Antanetibe-Nord puis à Ankazobe, en zone rurale. Nous remercions du fond du coeur toutes les personnes qui ont soutenu ce projet. Avec votre aide, nous contribuons ensemble au renforcement de l’éducation des enfants et à la formation des enseignant·es. C’est tellement précieux!

Je reçois donc cette foi qui m’habite comme un cadeau fragile et précieux. Elle m’invite, avec sa douce exigence, sur un chemin d’engagement artistique, spirituel, social et politique. Je ne peux rester indifférente à ce qu’elle crée en moi. Je la protège avec tendresse et reconnaissance.

Je vous laisse avec ces quelques mots que j’affectionne. «Il en va de même pour la foi: à elle seule, si elle ne se manifeste pas par des actes, elle est morte.» (Epître de Jacques 2,17). Et cette parole de José Marti: «L’hymne le plus agréable à Dieu est le bonheur de toutes les créatures.»