Xavier Michel, l'amour des mots
En février passé, le groupe Aliose était sélectionné dans la catégorie « Album révélation » des Victoires de la musique. Si le titre a finalement été remis à la Lilloise Juliette Armanet, cela a permis au duo et couple genevois composé d’Alizé Oswald et de Xavier Michel d’interpréter l’un de ses titres lors de la soirée de gala télévisée en présence de grands noms de la chanson française contemporaine tels que Julien Doré, Soprano ou Orelsan.
Si la musique occupe, évidemment, une place importante dans sa vie, Xavier Michel est aussi passionné par l’histoire. Son mémoire de master a été publié sous le titre Le théâtre interdit ? Les réglementations des spectacles à Genève entre Calvin et Rousseau. Un thème qui l’a également amené à collaborer à l’exposition Rendre la Réforme aux Genevois, côté chaire, côté rue, côté sens, présentée en mai à Genève.
Calvin, pas si austère
«Mon travail de recherche porte essentiellement sur le XVIIe siècle et le début du XVIIIe siècle. Quelles sont les preuves que le théâtre y a été interdit à cette époque ? Je rappelle aussi que sous Calvin, des pièces étaient montées avec la bénédiction des autorités. Ce fait était déjà connu, mais il a été beaucoup mentionné par les chroniqueurs quand le livre est sorti», raconte l’historien. «Il est assez parlant que ce point ait retenu l’attention, alors que ce n’est pas le sujet de la recherche. C’est le signe que dans l’esprit des gens, il y a toujours cette idée que tous les arts, les spectacles, les plaisirs étaient bannis par Calvin et le mouvement de Réforme. Cette image de Calvin tellement austère est juste à bien des égards, mais excessive. Il était lucide !» Réhabiliter Calvin n’est toutefois pas un acte militant pour Xavier Michel ! «J’y suis arrivé vraiment par intérêt pour le théâtre et par un concours de circonstances. J’ai suivi un séminaire sur la Réforme de Christian Grosse et Philipp Benedict. Et j’ai lu quelque part que le théâtre avait été interdit en 1617 à Genève et ça m’a titillé de savoir pourquoi. Toute l’histographie l’affirme, sans jamais le prouver. C’est ce qui m’a donné l’idée de ce travail», explique-t-il. «C’est vrai qu’après ce livre, beaucoup de gens pensent que je suis protestant.»
Passion pour l'écriture
Une année après la sortie de leur album Comme on respire, Alizé Oswald et Xavier Michel prennent un peu de temps à Genève et préparent leur prochain opus. «Aujourd’hui, je suis vraiment très très axé sur Aliose. Forcément ! car il y a beaucoup de choses qui se passent. A un moment, il faut se donner à 600 % pour avancer», explique le musicien qui reconnaît avoir dû faire un choix entre l’histoire et la musique. «Je suis assez boulimique de projets. Des fois, ça me manque un peu de ne plus avoir plein de choses à mener en parallèle.» Passionné d’écriture, Xavier Michel a écrit des pièces de théâtre, une comédie musicale, de la poésie. «En tournée, il y a de longs moments passés dans les transports. J’ai tendance à écrire alors qu’Alizé écoute beaucoup de musique. Même quand je marche dans la rue, j’ai souvent une idée d’écriture en tête.»
La finitude humaine
Ce thème est présent dans les titres d’Aliose. Une forme de spiritualité ? «Les textes des chansons doivent rester accessibles, populaires. J’ai eu envie d’aborder des thèmes historiques, mais je ne l’ai jamais fait frontalement, parce que je trouve ça compliqué et pompeux. La spiritualité est encore autre chose. Quand elle se mêle à l’écriture, c’est toujours sous forme de remise en question», estime le musicien.
«Mais il est vrai que c’est un sujet qui revient souvent, quand j’écris des chansons ou de la poésie. Ce thème m’est très familier. J’ai été élevé dans un milieu très catholique – mon père était animateur pastoral – et j’ai vécu mes dix premières années dans des églises. La spiritualité est donc quelque chose d’assez imprégné en moi», reconnaît Xavier Michel. «Après, mes parents ont divorcé et mon père a changé complètement de direction professionnelle. J’ai pris quelques distances par rapport au côté dogmatique de l’Eglise vers l’âge de 18 ou 20 ans. C’était peut-être lié à mes études, car c’était le moment où j’ai commencé à aller plus loin dans mes réflexions, à relativiser, à tout remettre en question. J’ai gardé une certaine spiritualité qui fait partie de mes fondations, même si je me suis éloigné de certains aspects dogmatiques des religions.»
Un batteur en fond de scène
«Être sur le devant de la scène, ce n’est pas forcément mon truc à la base. Cela ne m’est pas très naturel. Ce n’est pas ça qui m’a attiré dans ce métier. D’ailleurs, sur le premier album d’Aliose, je ne chante quasiment pas, même si j’ai participé à l’écriture», explique Xavier Michel. «C’est par la scène que l’on en est venu à incarner un vrai duo, et c’est devenu une évidence. C’est peu à peu que je me suis fait la place que j’occupe aujourd’hui sur le devant de la scène.» Il complète : «J’aime vraiment cela, mais spontanément, j’aurais plutôt tendance à aller en fond de scène. Je suis batteur à l’origine, c’est tout dire !»
Bio express
1983 Naissance à Genève dans une famille d’origine jurassienne.
2003 Une nouvelle de Xavier Michel, alors collégien, reçoit le Prix d’encouragement Adelphia.
2004 Rencontre avec Alizé Oswald à Nyon.
2009 Aliose, premier album autoproduit.
2017 Comme on respire sélectionné aux Victoires de la musique.