Investiture: interview exclusive du pasteur choisi par Trump
Lorenzo Sewell est le pasteur de l’Eglise évangélique «180 Church» à Detroit, dans l’Etat du Michigan. Ce lundi, il participera officiellement, devant les chaînes de télévision du monde entier, à l’investiture de Donald Trump. Pour cet Afro-Américain et ancien «pharmacien de rue», comme il aime à se présenter avec humour, la fierté est à son comble. «Que quelqu’un comme moi puisse prononcer une bénédiction lors de l’investiture du 47e président des Etats-Unis réalise, à mes yeux, une partie du rêve de Martin Luther King», a-t-il exprimé dans la presse américaine.
Le pasteur ne cherche pas à cacher son parcours atypique, qu’il présente brièvement sur le site de son Eglise. «Il a grandi dans un foyer où régnait la violence physique et verbale», y apprend-on. Alors que «son père est allé en prison et son jeune frère a tué», le jeune adolescent rencontre des difficultés scolaires qui le conduisent à «fortement s’impliquer dans la drogue et le trafic de stupéfiants, devenant finalement un chef de gang». Avant de «rencontrer le Christ» en 1999. Il nous accorde un entretien éclairant sur l’engouement des évangéliques du pays, qui ont encore une fois largement soutenu le candidat républicain.
Comment vous êtes-vous retrouvé à participer à l'investiture de Donald Trump?
L’équipe Trump m’a contacté en raison d’une promesse que Donald Trump m’a faite lorsqu’il est venu dans mon église le week-end de son anniversaire. A la fin du culte, il m’a déclaré qu’il m’inviterait à son investiture en cas de victoire.
A votre avis, pourquoi vous a-t-il choisi?
Il m'a dit avoir été particulièrement touché par la prière que j’ai formulée pour lui à cette occasion. Il a aimé le fait que celle-ci n’avait pas été écrite en amont, mais soit improvisée sur le moment, quelque chose qu’il n’avait jamais vu auparavant.
Quelle a été votre réaction quand on vous a fait cette proposition? Avez-vous hésité?
Je ne pense pas qu'une personne saine d'esprit puisse hésiter à participer au plus grand événement de notre vie. Il s'agit du plus grand retour politique de l'histoire de l'humanité.
Concrètement, quel sera votre rôle ce jour-là?
Je suis appelé à prononcer une bénédiction. Je lirai également le discours «I have a dream» de Martin Luther King (cette investiture se tient cette année le même jour que le Martin Luther King Day, ndlr.)
Comment votre engagement politique est-il apprécié au sein de votre congrégation: peut-il poser des problèmes ou êtes-vous tous du même bord politique?
En tant qu’Eglise locale, nous invitons tout le monde à venir, quelle que soit son affiliation politique. Bien sûr, il y a des gens dans mon Eglise qui pensent et votent différemment, mais nous sommes tous appelés à l’amour de la même façon.
Les évangéliques ont largement soutenu Donald Trump. Comment le comprenez-vous?
Comme beaucoup d’évangéliques, je le soutiens parce que je crois qu'il a été appelé à diriger notre pays. J’ai le sentiment que c’est un homme très authentique. Qu’il se rende dans des Eglises évangéliques est encourageant en tant que pasteur, mais ce n’est pas la raison principale pour laquelle je l’ai soutenu. Pour ma part, je ne vote pas pour des personnes en fonction de leur religion ou de leurs croyances, mais en fonction de leur programme et actions politiques.
Diriez-vous, comme d'autres, qu'il a une mission divine ou qu'il ne fait que défendre des positions politiques en phase avec la sensibilité évangélique du pays?
Quand vous avez échappé à deux tentatives d'assassinat et à trente-quatre condamnations criminelles, c’est que Dieu est certainement en train de préparer quelque chose dans votre vie…
Certains estiment que son comportement, comme sa grossièreté ou son attitude envers les femmes, est contraire aux valeurs chrétiennes. En tant que pasteur, comment réagissez-vous à ces critiques?
Nous ne votons pas pour un chef spirituel, nous recherchons un commandant en chef. D’après la Bible, il n'y a pas eu historiquement de bons rois en Israël, et seulement huit dans le Royaume de Juda (petit royaume du Proche-Orient ancien, alors en rivalité avec Israël, ndlr.) Le président Donald Trump est l'homme qui a été appelé et nous croyons que Dieu saura l’utiliser pour sa gloire.
A votre avis, est-il justifié de mélanger religion et politique?
On ne peut pas être spirituel sans faire de politique. La Bible elle-même est un livre politique. Si vous retirez la politique de la Bible, vous n'avez plus de Bible. Elle est remplie de rois, de juges et de partis politiques. Il est important que les personnes croyantes s'impliquent politiquement afin de façonner et de modeler notre pays toujours plus en direction du Christ.
Comment décririez-vous les Etats-Unis d'aujourd'hui en termes religieux et spirituels?
Notre pays a envoyé plus de missionnaires chrétiens à travers le monde entier que n'importe quelle autre nation. Aux Etats-Unis, nous sommes libres et pouvons adorer Dieu partout où nous le désirons, à chaque instant de nos existences. En termes de vie spirituelle, on constate une vraie vivacité: les groupes de lectures bibliques sont en hausse et les Américains recherchent Dieu.