Une boisson qui se vit comme relation

Joël Burri, rédacteur en chef de Réformés / © DR
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Joël Burri, rédacteur en chef de Réformés
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Une boisson qui se vit comme relation

Edito
par Joël Burri, rédacteur en chef

Fête des vignerons, fêtes des vendanges… quelle boisson peut se targuer d’être au coeur d’autant d’attentions? Breuvage des banquets comme des pratiques religieuses, le vin fascine, et ce, depuis fort longtemps: on trouve des traces de fêtes de la vigne dans le royaume de Syrie dans des textes qui ont été écrits entre le XIVe et le XIIe siècle avant l’ère chrétienne. Il symbolise à la fois le labeur de l’humain et la foi en ce Dieu qui pourvoit. Le vin facilite les relations, et pourtant, en abuser conduit à la rupture. Il accompagne nos joies, mais peut provoquer des malheurs.

En consommer marque souvent l’entrée dans l’âge adulte, alors que celui qui refuse d’en boire sera rapidement catalogué de rabat-joie. Un point qui mérite notre attention: le vin doit rester le complice des relations et ne pas devenir la raison de la stigmatisation de ceux qui n’en consomment pas.

Le vin est aussi riche de symboles qu’il est riche en arômes. En boire un verre n’a rien d’anodin, raison pour laquelle lever le coude implique ses traditions, ses coutumes, ses interdits. Traditions, coutumes et interdits, ne s’agit-il pas là des porteurs d’une culture, voire d’une identité? On est tenté de le croire, d’autant plus que ces codes sont différents d’un pays à l’autre, d’une société à l’autre!

Reconnaissons une évolution dans la manière de consommer: fini le gros rouge qui tache pour les classes populaires et les vins fins pour les classes aisées. Désormais, pour marquer sa différence, il faut se pencher, suivant l’image que l’on veut donner de soi, sur un vin biodynamique, sur la production confidentielle d’un petit producteur inconnu, sur un cépage rare ou sur une valeur sûre. Bref, il n’est pas rare de boire moins, mais plus souvent ou du moins de meilleure qualité.

Mais à l’heure de la mondialisation et de la sécularisation, alors que d’autres éléments dans lesquels notre identité collective s’enracine – à commencer par la religion – semblent en perte de vitesse et relayés à la stricte sphère individuelle, la ritualisation qui entoure la boisson se porte bien. Le vin reste ainsi l’un des rares marqueurs d’appartenance collective. Est-ce une conséquence d’une société hédoniste ou le signe d’une importance accrue accordée aux relations? C’est ce que nous vous invitons à questionner.