Le moine internaute au secours de la paix au Kosovo.
7 avril 2000
Sava Janjic, le jeune cybermoine, numéro 2 de l'Eglise orthodoxe serbe a alerté le monde sur les atrocités commises sur les Albanais du Kosovo
Il lance aujourd’hui des appels en faveur de la cohabitation. Rencontre à Gracanica.Pendant les bombardements de l’OTAN, le « cybermoine » a raconté au monde par « e-mails » les atrocités commises sur les Albanais. Aujourd’hui numéro deux de l’Eglise orthodoxe serbe au Kosovo, le Père Sava Janjic lance des appels au dialogue et à la paix. Traître et ennemi pour les extrémistes de tous bords, il est un allié de poids pour la communauté internationale qui cherche une solution pour le Kosovo.
Gracanica à 10 kilomètres de Pristina. C’est là que vivent aujourd’hui près de 10'000 Serbes sous haute protection de la force de paix de l’ONU, la KFOR. Au cœur de l’enclave, un monastère gardé par des militaires suédois. Gracanica est aujourd’hui le quartier général de l’Eglise orthodoxe serbe du Kosovo.
Au premier étage de l’antique bâtiment, le Père Sava Janjic, un colosse roux de 33 ans accueille visiteurs et journalistes. Aux murs, des photos des églises détruites par les « extrémistes albanais ». Au fond de la salle commune, des ordinateurs, des imprimantes, des modems. Après avoir raconté pendant des mois au monde les horreurs de la persécution contre les Albanais, Sava Janjic témoigne aujourd’hui de la souffrance des Serbes du Kosovo, sans toutefois ménager ses critiques au régime de Milosevic.
§Tout acte de violence contre les Serbes est du pain béni pour Milosevic« Il y a ici aujourd’hui 50'000 soldats des meilleures armées du monde, explique le Père Sava, des centaines d’organisations humanitaires, les Nations Unies. La communauté internationale met en jeu toute son autorité et sa crédibilité dans ce projet de paix. Et pourtant les choses vont mal. » Et le jeune moine de rappeler la destruction de plus de 80 églises orthodoxes, la fuite de dizaine de milliers de Serbes, de Tziganes et d’autres minorités non albanaises.
« Les extrémistes albanais pensent que plus ils détruiront d’églises et de maisons serbes, moins ces derniers auront une raison de réclamer le Kosovo comme étant une partie de leur pays et le berceau de leur religion. » Un raisonnement simpliste, que le Père Sava renvoie dos-à-dos avec celui du gouvernement de Belgrade. «Milosevic n’a aucun programme précis pour l’avenir du Kosovo. Tout ce qu’il cherche à faire est de rendre la situation encore plus insupportable qu’elle ne l’est aujourd’hui pour pouvoir ensuite accuser la communauté internationale de ne rien faire. Tout acte de violence contre les Serbes est du pain béni pour Milosevic qui, à chaque fois, voit son image de sauveur de la nation se renforcer auprès des populations», soupire le Père Sava.
§Les radios propagandes de MilosevicLe combat du cybermoine a été et reste aujourd’hui celui de l’information. Au Kosovo, les médias extrêmistes ont un énorme impact sur les populations et la voix de modérés comme le Père Sava quasi inaudible. A Gracanica par exemple, seuls quelques dizaines de personnes suivent les offices religieux où ils ont la possibilité d’entendre le discours modéré du jeune moine. La radio locale par contre, une des six ou sept que Milosevic a fait installer dans les régions serbes du Kosovo, abreuve de sa propagande des milliers de personnes. « Les modérés tant serbes qu’albanais, qui peuvent trouver les moyens de cohabiter et qui ont compris que l’avenir du Kosovo passe par la construction d’institutions démocratiques, ces gens-là sont complètement isolés, analyse le moine internaute. « Nous devons agir très vite sous peine de perdre toute crédibilité auprès des populations » ajoute encore le Père Sava qui demande un soutien accru de la communauté internationale. « Vous savez que Radio Gracanica affirme que l’évêque Artemije (NDRL chef de l’Eglise orthodoxe serbe) doit être défroqué et Monsieur Draskovic, le chef de l’opposition à Milosevic, pendu. Je ne sais pas le sort qu’ils me réservent, quelque chose de similaire sans doute… » dit le jeune moine avec un rire nerveux.
Une première victoire
Le 3 avril dernier, les délégués du Conseil national serbe du Kosovo ont décidé d’envoyer des représentants aux organes intérimaires du gouvernement mis en place par l’administration internationale au Kosovo. (Le Temps du 4 avril) Une victoire pour Mg.r Artemije et son bras droit le Père Sava, qui tentent ainsi de trouver une légitimité aux yeux du peuple serbe du Kosovo. Mais l’instauration d’un Etat multi -ethnique semble encore loin aux yeux de Sava Janjic.
« Quand il est arrivé au Kosovo, Bernard Kouchner rêvait de voir les enfants serbes et albanais jouer ensemble, déclare le moine. Il doit aujourd’hui déchanter. On ne peut pas forcer des gens à vivre ensemble. Coexister pacifiquement serait déjà un grand pas.» Et le Père Sava d’évoquer ce qui lui semble le plus important pour l’avenir de son pays: « Nous avons tous besoin de repentir. Arrêtons de rendre les autres toujours responsables de notre propre malheur. Il faut aussi chercher les causes de ce malheur en chacun de nous». Dans ce sens, une demande de pardon constituerait un acte symbolique très important. Les responsables musulmans ont demandé à l’Eglise orthodoxe de faire le premier pas.
Gracanica à 10 kilomètres de Pristina. C’est là que vivent aujourd’hui près de 10'000 Serbes sous haute protection de la force de paix de l’ONU, la KFOR. Au cœur de l’enclave, un monastère gardé par des militaires suédois. Gracanica est aujourd’hui le quartier général de l’Eglise orthodoxe serbe du Kosovo.
Au premier étage de l’antique bâtiment, le Père Sava Janjic, un colosse roux de 33 ans accueille visiteurs et journalistes. Aux murs, des photos des églises détruites par les « extrémistes albanais ». Au fond de la salle commune, des ordinateurs, des imprimantes, des modems. Après avoir raconté pendant des mois au monde les horreurs de la persécution contre les Albanais, Sava Janjic témoigne aujourd’hui de la souffrance des Serbes du Kosovo, sans toutefois ménager ses critiques au régime de Milosevic.
§Tout acte de violence contre les Serbes est du pain béni pour Milosevic« Il y a ici aujourd’hui 50'000 soldats des meilleures armées du monde, explique le Père Sava, des centaines d’organisations humanitaires, les Nations Unies. La communauté internationale met en jeu toute son autorité et sa crédibilité dans ce projet de paix. Et pourtant les choses vont mal. » Et le jeune moine de rappeler la destruction de plus de 80 églises orthodoxes, la fuite de dizaine de milliers de Serbes, de Tziganes et d’autres minorités non albanaises.
« Les extrémistes albanais pensent que plus ils détruiront d’églises et de maisons serbes, moins ces derniers auront une raison de réclamer le Kosovo comme étant une partie de leur pays et le berceau de leur religion. » Un raisonnement simpliste, que le Père Sava renvoie dos-à-dos avec celui du gouvernement de Belgrade. «Milosevic n’a aucun programme précis pour l’avenir du Kosovo. Tout ce qu’il cherche à faire est de rendre la situation encore plus insupportable qu’elle ne l’est aujourd’hui pour pouvoir ensuite accuser la communauté internationale de ne rien faire. Tout acte de violence contre les Serbes est du pain béni pour Milosevic qui, à chaque fois, voit son image de sauveur de la nation se renforcer auprès des populations», soupire le Père Sava.
§Les radios propagandes de MilosevicLe combat du cybermoine a été et reste aujourd’hui celui de l’information. Au Kosovo, les médias extrêmistes ont un énorme impact sur les populations et la voix de modérés comme le Père Sava quasi inaudible. A Gracanica par exemple, seuls quelques dizaines de personnes suivent les offices religieux où ils ont la possibilité d’entendre le discours modéré du jeune moine. La radio locale par contre, une des six ou sept que Milosevic a fait installer dans les régions serbes du Kosovo, abreuve de sa propagande des milliers de personnes. « Les modérés tant serbes qu’albanais, qui peuvent trouver les moyens de cohabiter et qui ont compris que l’avenir du Kosovo passe par la construction d’institutions démocratiques, ces gens-là sont complètement isolés, analyse le moine internaute. « Nous devons agir très vite sous peine de perdre toute crédibilité auprès des populations » ajoute encore le Père Sava qui demande un soutien accru de la communauté internationale. « Vous savez que Radio Gracanica affirme que l’évêque Artemije (NDRL chef de l’Eglise orthodoxe serbe) doit être défroqué et Monsieur Draskovic, le chef de l’opposition à Milosevic, pendu. Je ne sais pas le sort qu’ils me réservent, quelque chose de similaire sans doute… » dit le jeune moine avec un rire nerveux.
Une première victoire
Le 3 avril dernier, les délégués du Conseil national serbe du Kosovo ont décidé d’envoyer des représentants aux organes intérimaires du gouvernement mis en place par l’administration internationale au Kosovo. (Le Temps du 4 avril) Une victoire pour Mg.r Artemije et son bras droit le Père Sava, qui tentent ainsi de trouver une légitimité aux yeux du peuple serbe du Kosovo. Mais l’instauration d’un Etat multi -ethnique semble encore loin aux yeux de Sava Janjic.
« Quand il est arrivé au Kosovo, Bernard Kouchner rêvait de voir les enfants serbes et albanais jouer ensemble, déclare le moine. Il doit aujourd’hui déchanter. On ne peut pas forcer des gens à vivre ensemble. Coexister pacifiquement serait déjà un grand pas.» Et le Père Sava d’évoquer ce qui lui semble le plus important pour l’avenir de son pays: « Nous avons tous besoin de repentir. Arrêtons de rendre les autres toujours responsables de notre propre malheur. Il faut aussi chercher les causes de ce malheur en chacun de nous». Dans ce sens, une demande de pardon constituerait un acte symbolique très important. Les responsables musulmans ont demandé à l’Eglise orthodoxe de faire le premier pas.