Genève: plus de cent Etats se mobilisent contre les mines antipersonnelles

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Genève: plus de cent Etats se mobilisent contre les mines antipersonnelles

1 septembre 2000
Du 11 au 15 septembre aura lieu à Genève la réunion des Etats signataires du Traité d'Ottawa qui interdit l'utilisation et la production de mines antipersonnelles
Les participants entendent accélérer la destruction des stocks de mines, intensifier l'aide aux victimes, et examiner la position de l'OTAN qui a utilisé des mines au Kosovo. Présentation des enjeux majeurs."Il y a urgence. Chaque minute compte", s'exclament les organisateurs de la Conférence de Genève réunissant les 138 Etats signataires du Traité d'Ottawa qui bannit la production et l'utilisation de mines antipersonnelles (voir encadré). Symbole de ce cri d'alarme, un sablier géant placé devant les bâtiments de l'ONU – celui-là même utilisé pour le passage à l'an 2000 - se retournera trois fois par heure pendant toute la durée de la conférence afin de rappeler que les mines causent une nouvelle victime toutes les 20 minutes. De nombreux problèmes restent entiers, même si plusieurs centaines de milliers de mines ont déjà été éliminées sur la planète en application du Traité d'Ottawa. A l'exemple des Etats pauvres qui peinent à détruire leur réserve de mines faute de ressources financières et techniques. La Conférence de Genève sera appelée à débloquer des moyens leur permettant d'accélérer la destruction de leur stock de mines. Elle devra aussi mettre sur pied une aide spécifique aux victimes dépassant les soins de première urgence, telles la fabrication de prothèses, la prise en charge psychologique et la réinsertion sociale.

§Ambiguïtés de l'OTANC'est au Cambodge que les besoins en la matière sont les plus considérables - un citoyen sur 236 est handicapé suite à l'explosion d'une mine, et au Kosovo où les belligérants, dont l'OTAN, ont laissé derrière eux des mines par milliers. Sans compter que les bombardements de l'OTAN ont répandu sur le Kosovo des centaines de bombes non explosées qui peuvent tuer à tout instant. Une situation d'autant plus préoccupante que la quasi totalité des Etats membres de l'OTAN ont ratifié le Traité d'Ottawa, hormis les Etats-Unis et la Turquie, ce qui leur impose de dire non à l'engagement de mines en cas de conflits. De la même manière, ils devraient s'opposer à ce que l'OTAN stocke des mines sur leur territoire. Ne respectant pas leurs engagements, ces Etats auront à clarifier leur position devant la Conférence de Genève.

§Détournement de fondsAutre difficulté, et non des moindres, seul un dixième des fonds affecté au déminage arrive effectivement sur le terrain, l'essentiel étant englouti dans des recherches technologiques de pointe – détection de mines par satellite, création de robots démineurs - qui profitent avant tout au secteur militaire. Résultat: les populations civiles résidant aux abords de zones minées vivent de nouveaux drames, et de grosses portions de territoire demeurent incultivables, d'où des problèmes de sous-alimentation et de pauvreté aggravés. Ces détournements de fonds sont en partie imputables aux Etats finançant le déminage, soit qu'ils ne vérifient pas la destination finale de leurs fonds, soit qu'ils privilégient un partenaire dont ils attendent en retour des faveurs. Les ONG présentes à la Conférence de Genève vont donc s'attacher à dresser des critères précis permettant d'identifier, parmi tous les potentiels bénéficiaires, les organismes de confiance. A noter que la Suisse a déjà pris ses précautions en ne coopérant qu'avec des institutions dont la probité est attestée.

§LacuneLa Conférence de Genève traitera aussi de la quantité de mines que les Etats signataires du Traité d'Ottawa sont habilités à stocker sur leur territoire à des fins de formation d'experts en déminage. Il s'avère en effet que plusieurs Etats en conservent un stock manifestement trop élevé, excédant de beaucoup les besoins d'entraînement des futurs démineurs, comme si cette arme continuait d'entrer dans une stratégie militaire. En guise de parade, les délégués discuteront d'un chiffre plafond de mines autorisées.

Enfin, au grand dam des ONG engagées dans la Campagne internationale contre les mines, la Conférence de Genève négligera un thème de discussion crucial, celui des mouvements de guérillas qui posent environ la moitié des mines sur la planète.