Cent ans de prière pour l’unité des chrétiens
15 janvier 2008
Cette année, la Semaine de prière pour l’unité des chrétiens célèbre du 18 au 25 janvier son centenaire
Kersten Storch, pasteure luthérienne, travaille comme chargée de programme à la Commission de foi et constitution du Conseil œcuménique des Eglises, à Genève. Elle retrace quelles furent les racines de cette manifestation, qui entend favoriser les gestes de bonne volonté œcuménique. A l’image de Fribourg, où la Charte œcuménique européenne sera signée par les représentants des Eglises. Interview.Une fois par an, la Semaine de prière pour l’unité des chrétiens, par des échanges de chaires ou des cultes œcuméniques spéciaux dans les paroisses protestantes, catholiques et orthodoxes, illustre les diverses façons d’adorer Dieu. Mais à l’origine, en 1908, le pasteur anglican américain Paul Wattson visait le retour des différentes confessions chrétiennes à l’Eglise catholique romaine. La signification de cette semaine s’est donc fortement modifiée depuis que ses dates ont été fixées ?On peut dire qu’elle n’a plus du tout le même sens. Son créateur avait une compréhension de l’unité des chrétiens qui visait à regrouper les différentes confessions sous l’autorité du pape de Rome. De ce fait, les fidèles souhaitant rester hors de l’Eglise catholique n’étaient pas intéressés à y participer, car son but leur paraissait théologiquement inacceptable. Seuls quelques anglicans favorables à une réunion avec l’Eglise catholique, comme Paul Wattson et la sœur Lurana White, qui se sont effectivement convertis au catholicisme, soutenaient la semaine de prière telle qu’elle était alors conçue. Mais cette initiative avait été précédée d’autres semaines ou jours de prière instituées sur le plan mondial par l’Alliance évangélique internationale, les mouvements d’étudiants chrétiens ou l’alliance mondiale des unions chrétiennes de jeunes gens et de jeunes femmes, qui toutes visaient à favoriser l’unité et la paix. A cette même époque, une impressionnante liste de responsables d’Eglises de diverses confessions adressent une lettre ouverte au Times appelant à prier pour unir les chrétiens. Il ne s’agissait nullement de remettre en question les convictions liées aux confessions de chacun, mais simplement d’être convaincu que Dieu voulait cette unité. C’est cette même idée, prier « pour l’unité visible que Dieu veut et qu’il réalisera quand il voudra et par les moyens qu’il voudra », qui sera affirmée par l’abbé catholique Couturier dès les années 1930. Elle permet aujourd’hui à de nombreux protestants de prier en communion avec les catholiques, sans pour cela souhaiter rallier l’Eglise de Rome.Un des résultats du Concile Vatican II est la préparation conjointe de cette semaine. La Commission foi et constitution du COE (églises protestantes et orthodoxes) et le Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens (Eglise catholique) choisissent le thème qui lui est consacré et préparent la documentation. Ces progrès sont-ils appelés à se poursuivre à l’heure où le pape semble donner des gages aux traditionnalistes, en célébrant la messe dos aux fidèles ?C’est justement le but de cette semaine de prière ! Il y a certes des signes de retour en arrière dans l’Eglise catholique, mais des forces conservatrices sont aussi à l’œuvre dans l’Eglise protestante et orthodoxe. Les Eglises cherchent à conforter leur propre identité. Le thème choisi pour cette semaine, « Vivez en paix entre vous » et « priez sans cesse » (Thessaloniciens 5 : 12a, 13b-18), rappelle que les Eglises ne doivent pas cesser leurs efforts en vue de l’unité. Les divisions qui règnent aujourd’hui ne sont pas seulement confessionnelles. Elles ont aussi leurs sources dans des identités nationales ou ethniques diverses, l’appartenance à une race, à un sexe ou un statut social différent, la manière d’appréhender les différentes orientations sexuelles ou d’intégrer les handicapés. La semaine pour l’unité ne peut résoudre tous ces problèmes, mais elle est un signe de victoire sur les divisions en permettant à l’unité de s’exprimer.Que penser des paroisses qui prévoient des célébrations œcuméniques, des échanges de chorales et des rencontres entre prêtres et pasteurs, mais qui offrent simultanément la possibilité de participer à une messe, pour ceux qui ne seraient pas intéressés?Ce n’est peut-être pas une bonne proposition, mais c’est une offre réaliste, qui illustre bien la situation de l’œcuménisme. Seuls ceux qui sont intéressés participent. Raison de plus pour persévérer dans la prière pour l'unité !