Liban: première fête commune entre chrétiens et musulmans
Au Liban, chrétiens et musulmans s’apprêtent à célébrer pour la première fois à Beyrouth une « fête nationale commune islamo-chrétienne » autour de la figure de Marie jeudi prochain le 25 mars. Le gouvernement libanais vient de donner son feu vert. L’initiative fera-t-elle des émules ailleurs ?
Par Camille Gonzales et Tania Buri
Lech Walesa, l'ancien leader polonais, est attendu jeudi Beyrouth, ont indiqué à Protestinfo les organisateurs de la manifestation au Liban. La fête se déroulera le jour de l’Annonciation dans le calendrier catholique, mais ne tend pas à la remplacer.
L’objectif de Saad Hariri, premier ministre libanais, est de créer des ponts entre les deux religions grâce à la Vierge Marie qui tient, chez les catholiques comme dans l’islam, une place de choix. Les Evangiles et le Coran la considèrent en effet comme une femme à part, élue entre toutes. Dans le Coran, une sourate entière lui est consacrée, qui relate l’annonce faite par l’Ange Gabriel de la naissance de Jésus, événement justement célébré par la fête catholique de l'Annonciation.
Elément de cohésion nationaleDe cette dévotion commune, le gouvernement libanais a voulu faire un élément de cohésion nationale, en s'appuyant sur le travail des acteurs du dialogue interreligieux. Le collège jésuite Notre-Dame de Jamhour dans la banlieue de Beyrouth est à l'origine de ce rapprochement. Il a initié cette cérémonie commune il y a trois ans sur l'impulsion de l'Amicale des anciens du collège, selon l'attachée de presse du collège.
Le Liban, un pays multiconfessionnel qui abrite 19 communautés religieuses, montre la voie de la concrétisation du dialogue religieux , selon Hafid Ouardiri, co-fondateur et directeur de la Fondation de l’Entre-Connaissance à Genève. Pour ce dernier, « fêter ensemble, c’est resserrer les liens. C’est l’occasion d’être en confiance les uns avec les autres pour partager ce que nous avons en commun et parler sans crainte de nos différences qui sont aussi enrichissantes pour tous ». La nouvelle fête sera d’ailleurs chômée et marquée par des programmes socioculturels destinés à valoriser les points communs entre les deux communautés.
Cette initiative est un signal fort d'une fraternité possible dans un contexte géopolitique difficile, soutient pour sa part Maroun Tarabay, membre délégué de l’Eglise catholique dans le canton de Vaud pour le dialogue interreligieux et membre fondateur du Groupe « Musulmans-chrétiens pour le dialogue et l’amitié ». Pour ce prêtre maronite originaire du Liban, cette initiative est « un rayon de soleil, surtout dans le contexte du Moyen-Orient où la situation des chrétiens est précaire, en particulier en Irak. Elle est la réalisation de la parole de Jean-Paul II qui voyait le Liban comme un « pays-message ».
Le message d’un engagement pour une coexistence pacifique se répandra t-il en Orient et en Occident ? Une telle fête pourrait-elle avoir sa place en Suisse, au niveau cantonal par exemple ? « L’enjeu, estime Hafid Ouardiri, serait d’y intégrer les autres sans distinction d’appartenance. La fête est un moment de joie qui devrait pouvoir être partagé par tous. Au-delà des particularismes religieux, il y a dans les religions des aspirations spirituelles très fortes qui unissent le genre humain et le dialogue interreligieux n’a de sens que si l’on dépasse les limites qu’imposent les communautarismes».
Collège Notre-Dame de Jamhour JOURNAUX
Des articles sur le sujet ont été publiàs dans les journaux français " La Vie " et libanais " L'Orient-Le jour "