Parler de Dieu à ceux qui n’y croient pas

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Parler de Dieu à ceux qui n’y croient pas

28 juin 2010
Le pasteur réformé français Antoine Nouis publie un essai de vulgarisation théologique pour présenter la foi chrétienne aux non-croyants. Essai transformé.


Par Marie Lefebvre-Billiez, Réforme

Thomas est un jeune scientifique agnostique qui a eu la bonne idée de vouloir épouser une fille de pasteur. Alors le beau-père, Antoine Nouis, après quelques discussions que l’on devine riches, a écrit une lettre à son futur gendre pour lui « expliquer la foi chrétienne. » Le petit essai se lit en moins de deux heures et la forme épistolaire en rend l’approche sympathique. Antoine Nouis commence par une énigme: comment le christianisme a-t-il pu prendre autant d’ampleur alors que son fondateur, Jésus-Christ, est mort jeune et abandonné?

Ne faut-il pas prendre au sérieux le témoignage de ses disciples qui affirment l’avoir revu vivant après sa mort ? Sur cette base, le pasteur réformé propose une réflexion en deux temps : ce que la Bible dit de l’homme, avec une analyse du récit de la Création et ses deux personnages emblématiques Adam et Ève ; puis ce que la Bible dit de Dieu, cet absolu qui s’est rétréci pour que l’homme existe libre. Enfin, Antoine Nouis propose la foi comme « un pari et un combat ». Il lance à son gendre le défi d’essayer: «Qu’est-ce que tu risques?»

Point de grands mots théologiques incompréhensibles ni d’affirmation dogmatique péremptoire. Mais de nombreuses références aux philosophes et aux théologiens juifs qui placent cet ouvrage à un niveau assez intellectuel. (...)

Proposer la foi comme un pari

L’ouvrage ne doit cependant pas être séparé de son contexte : « Il s’adresse à une personne déjà reliée à la religion par sa future femme et son beau-père. C’est la conséquence d’un dialogue. Il s’adresse donc à des gens qui ont envie d’aller plus loin, de comprendre et de poser des questions. Il n’est pas pour des non-croyants, qui se posent d’autres questions, comme : “Pourquoi le mal ?” Cela, il n’en parle pas. »

Selon Guy Balestier, secrétaire national chargé de la coordination interrégionale pour l'évangélisation de l'Eglise réformée de France, proposer la foi comme un pari en exhortant à l’expérimenter est assez moderne, et pertinent pour un scientifique. Cela place la problématique dans une triangulaire dynamique : comprendre, croire et pratiquer.

« Il y a plein de chemins différents qui mènent à la foi. La formule, assez évangélique, de “belonging before believing” (appartenir avant de vivre) en est une. La personne est amenée sur le chemin du vécu religieux par une communauté qui la porte. “Vis les choses et tu verras bien !” » Pour autant, Guy Balestier prévient : une personne qui prendrait ce chemin aura besoin d’être accompagnée, au-delà du livre lui-même.

Liberté révolutionnaire

C’est exactement le cas d’Estelle, vingt-neuf ans, qui se définit comme une « athée qui se pose des questions ». Élevée sans aucune éducation religieuse, non baptisée, elle a commencé à s’interroger l’année dernière. Elle ressentait un « manque de spiritualité », et a fait une retraite dans le silence qui lui a permis de « descendre profondément en soi ». Le livre d’Antoine Nouis lui a permis d’approfondir ses interrogations.

« Tout d’abord, c’est bizarre de vivre sans se poser la question de savoir s’il n’y a pas une autre dimension que celle de travailler pour gagner de l’argent et le dépenser. Ensuite, pourquoi y a-t-il autant de gens qui croient sur Terre ? Les athées sont une minorité ! Pendant longtemps, je trouvais que les croyants étaient des idiots qui avaient peur de la mort. Avec ce livre, j’ai réalisé que les gens ne croient pas parce qu’ils ont peur. C’est plus compliqué et profond que cela. »

Estelle a particulièrement aimé le passage sur la liberté. « Nous sommes libres de faire des erreurs et de tourner notre dos à Dieu, c’est pour cela qu’il y a des gens athées comme moi. Ça, c’est révolutionnaire ! » Alors Estelle a voulu relever le défi. Elle a pris rendez-vous avec le prêtre de la paroisse la plus proche. Mais en même temps, « j’ai peur de bouleverser mes habitudes, de ne plus être moi-même, de perdre mes amis.

Je n’ai pas envie d’entraîner les autres avec moi ». Elle pense à son compagnon, avec qui elle vit sans être mariée, et dont elle est enceinte. Le bébé, « nous avons décidé de ne pas le baptiser ». Pourtant, elle a fortement envie de « continuer sa démarche, d’aller plus loin. J’ai envie de croire. Je suis en chemin. »

Lire

  • Lettre à mon gendre agnostique pour lui expliquer la foi chrétienne, Antoine Nouis. Labor et Fides , 2010, 102 pages.