A quoi sert la théologie féministe?
Par Andrea Taschl-Erber, collaboratrice scientifique à l'Institut de sciences bibliques de l'Université de Graz (Autriche),Bonne Nouvelle*
C'est l'expérience de femmes en particulier qui est au point de départ de ce questionnement critique de l'image de Dieu et de celle de l'être humain transmises dans la Bible et par la tradition. Toutefois, dans une vision globale, les expériences d'oppressions multiples, provoquées par le racisme, l'exploitation économique, le colonialisme, etc. sont elles aussi de plus en plus prises en compte.
Cette option de base a été mise en œuvre dans les différentes disciplines de la théologie. Une lecture féministe critique des textes bibliques analyse dans quelle mesure des préjugés et des intérêts ont contribué à fixer des rôles particuliers aux femmes (et aux hommes) dans la société et dans l'Eglise. Une interprétation féministe de la Bible pose aussi le même «soupçon» sur une interprétation qui est dominée par les hommes au long de l'histoire et qui voudrait justement que la référence à la Bible puisse justifier la soumission des femmes.
Reconstruction féministeLa reconstruction féministe des données historiques réelles derrière les textes bibliques rencontre deux problèmes, car la présence et la participation des femmes sont souvent doublement mal reflétées: premièrement, les femmes ont été mises de côté dans les textes bibliques, puisque les Ecritures sont imprégnées par un ordre social patriarcal. Deuxièmement, ce sont des interprétations essentiellement masculines qui en ont été données.
Les études ont cependant montré que les femmes avaient contribué beaucoup plus largement à la vie publique d'Israël, au mouvement de Jésus et aux tâches de direction dans les premières communautés que ce qu'en disent les textes et les interprétations qui ont vu le jour dans une société dominée par des hommes. L'interprétation féministe essaie ainsi de donner une visibilité à des interprétations féminines rejetées ou tombées dans l'oubli et de redonner une voix à des femmes condamnées au silence. Pour rendre efficace le contenu libérateur des textes bibliques, ceux-ci doivent souvent être lus à rebrousse-poil de leur point de vue et de leur langage centrés sur les hommes.
*Ce texte a été commandé à l'auteure, puis traduit par le journal Bonne Nouvelle, le journal de l'Eglise évangélique réformée du canton de Vaud (EERV).
INFOS
- Cette conférence a lieu dans le cadre du Programme de recherche sur les Evangiles de l’Enfance, organisé par les professeurs de Nouveau Testament et de littérature chrétienne ancienne de Suisse Romande : Claire Clivaz (Université de Lausanne), Andreas Dettwiler (Université de Genève), Luc Devillers (Université de Fribourg), Enrico Norelli (Université de Genève), et soutenu par la Conférence universitaire de Suisse occidentale (CUSO) théologie.
- Conférence d'Andrea Taschl-Erber en allemand : «Lectures féministes des Evangiles de l'enfance», vendredi 5 novembre à 16h00 à l'Université de Genève, Bastions B 111, dans le cadre du programme de recherche «Lectures plurielles des Evangiles de l'enfance». Détails sur http://www3.unil.ch/wpmu/evenfance/