La table pascale : entre traditions et renouveau
«Pour comprendre les coutumes de Pâques, il faut se référer au Carême et à ses prescriptions» rappelle Isabelle Raboud-Schüle, directrice-conservatrice du Musée gruérien et spécialiste des coutumes alimentaires dans l'Arc alpin. «Pâques est le moment où ces interdictions sont levées et où il est à nouveau permis de consommer certains produit d'origine animale, comme la viande, la graisse, mais aussi les œufs et les dérivés du lait». Les convives ne sont plus tenus de «faire maigre» et certaines pâtisseries riches en beurre et en œufs, comme la colombe de Pâques ou l'alise pacaude (galette de Pâques), sont donc particulièrement mises à l'honneur lors des fêtes pascales. La fin de l’abstinence
Le Carême, qui commémore les quarante jours que le Christ a passé dans le désert, a été surtout compris comme un temps de pénitence dans la liturgie catholique. Or la discipline du jeûne qui l'accompagnait, a été amenée à évoluer au cours des siècles. Si se priver de lard durant le carême pouvait constituer un véritable acte de privation au Moyen âge «quand le lard constituait l’un des rares moyens de donner du goût aux aliments», ce n’est plus vraiment le cas aujourd’hui. Depuis le dernier tiers du XXe siècle, l’église catholique conseille «d’autres types de privations volontaires, comme les produits de confiserie, correspondant mieux à la réalité actuelle».
Du côté des Eglises réformées, celles-ci n'ont jamais imposé de pratiques de pénitence ou de jeûne. Pour favoriser plutôt, pendant cette période, la prédication et la méditation. L'article de Wikipedia ajoute: « Si dans le luthéranisme on trouve parfois la recommandation de l'abstention de viande le Vendredi Saint, le protestantisme n'est pas directif, aucune consigne particulière n'ayant été laissée par les Apôtres. » Rappelons aussi que pour les protestants, le salut s'obtient par la foi seule, sola fide. Exit donc le besoin d'accomplir des oeuvres de pénitence pour s'assurer le salut.
Stimulant d’origine végétale et peu répandu dans la population, le chocolat ne faisait pas partie des plaisirs proscrits durant les siècles précédents, mais il s’est démocratisé et est devenu la friandise par excellence. Or, «depuis les années 1970, du fait que l’Eglise catholique conseille de se priver de sucreries et de chocolat durant le carême, l’attractivité du chocolat s’en trouve renforcé à Pâques, tout comme lors des autres fêtes d’ailleurs», a relevé Mme Raboud-Schüle.
Le sang de l'agneau fut répandu sur les linteaux des portes des maisons des fils d'Israël et ce signe sauva la vie de tous leurs premiers-nés. Conformément aux prescriptions divines, l'agneau immolé devait être mangé debout, à la hâte, le bâton à la main. Plus de 1500 ans après l'Exode, apparut la figure de Jésus, appelé «agneau de Dieu», sacrifié pour sauver l'humanité. La docilité et l’innocence de l’animal d’une part, la sollicitude du berger pour ses protégés d’autre part, ont contribué à faire de l’agneau un emblème chrétien.
Mais outre ces éléments symboliques, il y a aussi un aspect saisonnier qui favorise l'apparition de l'agneau dans le repas pascal. «Tout comme les oiseaux pondent plus d'œufs au printemps, les brebis mettent également bas en cette saison où la végétation repart», explique Isabelle Raboud-Schüle, «même si ces cycles naturels paraissent moins évidents aujourd’hui, car l’agriculture les a beaucoup influencés, pour satisfaire nos besoin de consommation».
Or contrairement à l'agneau, on ne trouve pas la moindre trace d'œuf dans les prescriptions bibliques ni dans la liturgie. Il est pourtant devenu l'élément le plus incontournable de la fête de Pâques, voire son signe annonciateur. «La coutume de s’échanger des œufs décorés à l’époque des fêtes pascales est un fait récent, dont les origines sont incertaines», déclare l’ethnologue. «Mais il est clair que l’œuf symbolise la fécondité dans de très nombreuses cultures, tout comme le lapin, printanier, rapide reproducteur, parfois considéré comme un peu lubrique». Une propriété que les Anciens ne manquaient pas de souligner, associant cet animal à Vénus, exaltant la puissance créatrice de la nature.
Le 24 avril 2011, toutes les Eglises chrétiennes, celles d’Orient comme celles d’Occident célèbreront la fête de Pâques à la même date. Mais pourquoi n’est-elle pas célébrée chaque année le même jour par toutes les Eglises chrétiennes ? Tout simplement parce qu’elles utilisent des calendriers différents selon leurs propres traditions. Cette année, comme en 2010, par une coïncidence de ces différents calendriers toutes les Eglises célébrent Pâques le même dimanche.
Cette année, une invitation a été lancée pour manger les uns avec les autres un repas simple à Pâques ou dans les 50 jours qui suivent Pâques.
Au cours des dix dernières années, la fête de Pâques a eu lieu à la même date pour tous les chrétiens à cinq occasions. Dans les années qui viennent, ces occasions seront moins fréquentes: les prochaines dates où Pâques tombera le même jour pour les deux traditions seront 2017 et 2025.
La date de Pâques étant calculée à l'aide soit du calendrier julien – utilisé par la plupart des Eglises orthodoxes – soit du calendrier grégorien, il est rare que les chrétiens d'Orient et d'Occident célèbrent cette fête le même dimanche. (Info-Oecuménique-COE)
Les Hébreux ont été les premiers à célébrer la Pâque, ou Pessah. Fête familiale par excellence, Pessah revêt une signification importante, car elle rappelle la naissance du peuple juif. Elle commémore en effet la fuite des fils d'Israël, échappant à l'esclavage du Pharaon pour gagner la Terre promise.
Pour cette raison, la célébration est particulièrement riche en symboles et en rites à caractère pédagogique. Le Seder, le repas pascal des juifs, comprend plusieurs mets symboliques, constituant autant de références directes à l’exode, à la persécution et à la providence divine. Ainsi, le plateau du Seder contient partout à travers le monde les mêmes éléments, tandis que le repas qui suit la cérémonie rituelle varie de pays en pays.
Le matzot, ou pain azyme, rappelle à la fois la condition de servitude du peuple juif et sa fuite précipitée, avant que le pain n’ait eu le temps de lever; les herbes amères se réfèrent à l’amertume de la vie en Egypte; un os recouvert de viande rappelle l’agneau sacrifié; un œuf cuit sous la cendre est également présent, mais comme symbole de désolation plutôt que de renouveau. Enfin, ce qui caractérise cette grande fête de la libération est la présence du récit de la fuite d’Egypte qui est au cœur du rituel.
- Tiré du livre de Pâques, Françoise Lebrun, Editions Robert Laffont 1986