Mieux vivre ensemble après le vote anti-minaret

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Mieux vivre ensemble après le vote anti-minaret



Anne Buloz
19 mars 2012
Participer à la vie associative, faire preuve de solidarité quand des chrétiens sont agressés à l'étranger et utiliser l'humour pour désamorcer les tensions : le Rassemblement de Suisses musulmans (RSM) publie trente propositions pour atteindre un objectif commun: remplacer le rejet par le respect.



Le 29 novembre 2009, la population suisse acceptait l’initiative populaire « Contre la construction de minarets » à 57,5%. Un « oui » inattendu qui avait induit un fort sentiment d’exclusion au sein de la population musulmane et qui nécessite, aujourd’hui encore, un important travail de compréhension et de réconciliation.


Pour relever ce défi, un groupe de citoyens travaille depuis deux ans sous l’impulsion de la Fondation Cordoue* de Genève, qui vise à enrichir le débat sur la paix dans le monde. De nationalité suisse et de religion musulmane, les membres du Rassemblement de Suisses musulmans (RSM) représentent les différentes régions linguistiques et la diversité de l’islam en Suisse. Ce groupe a publié vendredi à Berne ses recommandations à destination autant des pouvoirs publics, des simples citoyens que des communautés musulmanes.

Meilleure visibilité dans la société


Le RSM conseille aux musulmans de prendre la parole. «Mais beaucoup de musulmans se sentent suisses. Et ne voient pas de raison de mettre leur religion en avant», explique Florence Laufer, responsable de programme à la Fondation Cordoue de Genève. 



Dans la même optique, le RSM défend la création d’une institution unique, qui représenterait tous les musulmans. Une des compétences de cette organisation faîtière serait de condamner les agressions et les violences faites par les musulmans contre les autres communautés religieuses à l'étranger.



« C’est important de le faire chaque fois, car cela rappelle au grand public que les musulmans de Suisse n’ont rien à voir avec ces actes. Pour ces derniers, c’est une évidence. Mais nous devons prendre les devants, estime Florence Laufer, compte tenu du degré d’incompréhension du grand public, qui fait souvent l’amalgame ».


Renforcer la citoyenneté

Une visibilité accrue passe aussi par une meilleure intégration des musulmans. D’où l’importance de s’impliquer dans la vie politique. Un tel engagement permettrait de souligner les valeurs partagées et de montrer l’intérêt commun pour la société en général.



« C’est aussi important d’être impliqués dans le tissu associatif, surtout qu’il compte beaucoup en Suisse. Certaines choses se font déjà, mais sans doute pas encore assez », précise Lucia Dahlab, vice-présidente de l’Union des organisations musulmanes de Genève. « Toutefois pour aller vers l'autre, il faut se sentir accepté, ce qui n'est pas toujours le cas des femmes voilées. »
A l'inverse, les lieux de rencontre musulmans sont invités à ouvrir leurs portes.


L’art est aussi vu comme un moyen de combattre les préjugés. « Le théâtre, les spectacles et les pièces plus comiques ne doivent pas hésiter à traiter de l'islam et de la diversité culturelle et religieuse en général. Les projets sont d’ailleurs souvent mixtes : les artistes surmontent les difficultés potentielles en créant ensemble. C’est vrai qu’il y a une sensibilité forte au blasphème, mais il faut distinguer l’humour sur la religion en tant que telle et l'aspect religieux culturel », conclut Florence Laufer.

Infos et lien :

  • La Fondation Cordoue de Genève a pour mission de promouvoir l'échange entre cultures et civilisations dans l'esprit de Cordoue et de contribuer à la recherche et à la promotion de la paix. Son programme de recherche action "Cordoue maintenant" analyse les dynamiques sociopolitiques et religieuses de contextes sensibles pour mettre en oeuvre des stratégies de transformation de conflit, particulièrement dans le monde arabe et musulman et sur le thème de l'islam en Europe. www.cordoue.ch

Cet article a été publié dans :

En rubrique suisse des quotidiens 24 Heures et La Tribune de Genève le samedi 17 mars.