Antoine Schluchter a aussi contacté les parents du meurtrier de sa fille
Photo: Le Temple de la Fusterie à Genève
«Ca a été un choc énorme», lâche Antoine Schluchter à propos de la mort d’Adeline, devant une cinquantaine de personnes réunies au Temple de la Fusterie. La jeune sociothérapeute a été tuée, le 13 septembre dernier, par son patient, alors qu’elle l’accompagnait à une séance d’hippothérapie.
Le pasteur qui a refusé de «se laisser salir par la haine» ne cache pas son trouble face à ce drame. «Il est important de réfléchir et de nommer les disfonctionnements du système», explique-t-il. Si ces dysfonctionnements existent, «c’est peut-être parce qu’on est dans un pays qui n’est pas habitué à vivre ce genre de drame».
Le 15 mai dernier, Antoine Schluchter a perdu sa fille Marie, tuée par un criminel récidiviste qui était en liberté conditionnelle. Pour traverser le mal radical, il a choisi d’aller puiser l’amour à la source: «l’évangile radical». «J’ai choisi un axe protecteur pour moi». Cette position extrêmement courageuse suscite un questionnement: est-ce le pasteur ou le père qui a choisi cette position?
«Ce sont les deux. Le fait d’être pasteur m’a amené à être souvent confronté à des situations lourdes dans des contextes de deuil». Pourtant, selon cet homme de 55 ans, sa profession ne lui a mis aucune pression par rapport à son comportement. «C’était naturel pour moi de réagir ainsi tout en étant un père blessé et souffrant».
Le soutien des autresMais ce n’est pas seulement l’évangile radical qui a permis à ce père de continuer à avancer. «Nous avons eu le grand privilège d’être entouré et porté par beaucoup de gens. Lors de notre drame, nous nous sommes jamais sentis seuls», explique le pasteur. Il a d’ailleurs pris contact avec les parents d’Adeline et de Lucie, assassinée en mars 2009.
Antoine Schluchter a aussi contacté les parents du meurtrier de sa fille, après avoir reçu «une lettre très touchante» de leur part. «C’était important, pour nous, de leur dire que nous n’avions rien à leur pardonner.»
Face au futur procès du meurtrier de Marie, les trois membres de la famille Schluchter l'appréhendent différemment. «Mon épouse ne veut pas connaître les détails concernant la mort de notre fille alors que mon autre fille a besoin de tout savoir. Moi, je me sens en peu entre les deux», ajoute le pasteur qui ne souhaite pas parler du meurtrier. Bien qu’Antoine Schluchter craigne la confrontation, il a choisi d'assister au procès: «pardonner ne m’appartient pas, je le confie à Dieu».
- Vous pouvez écouter le culte d'Antoine Schluchter au Temple de Villars-sur-Ollon le 18 août dernier
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