Djihadistes suisses, des combattants recrutés par internet
Photo: Une page Facebook arbore un drapeau djihadiste. DR
, Le News
Les djihadistes suisses représentent-ils un danger? Le silence des musulmans modérés de Suisse a été rompu il y a une dizaine de jours après l’arrestation au Kosovo de deux imams qui avaient séjourné en Suisse pour recruter des combattants pour la Syrie et l’Irak. Quatre jours après, le Centre islamique albanais de Lausanne dénonçait ceux qu’il qualifiait «de laveurs de cerveaux» dont les actions «qui choquent le monde entier de jour en jour, n’ont rien à voir avec l’Islam et ses vrais principes sains.»
L’une des personnes interpellées est l’imam de la grande mosquée de Pristina, Shefqet Krasniqi, qui voyageait en Suisse grâce à un visa Schengen. La police a trouvé une somme considérable en francs suisses lorsqu’ils ont fouillé son domicile, selon Albinfo.ch, un site web pour les albanophones basé à Lausanne. Le Suisse converti à l’islam Nicolas Blancho, connu pour ses positions radicales avait invité Krasniqi pour parler dans les mosquées locales.
Officiellement, Berne considère que les risques d’une attaque djihadiste contre les citoyens suisses sont faibles et que les activités de l’Etat islamique en Suisse consistent essentiellement à enrôler des combattants par internet et à hacker des banques dans le but de financer leur guerre sainte. Le service de renseignement de la Confédération n’a pas revu son estimation de mai 2014 selon laquelle il y a 40 djihadistes de Suisse actuellement en Syrie et en Irak. Les experts en terrorisme surveillent les activités en ligne d’une soixantaine de personnes supplémentaires sur le territoire suisse.
Un réseau francophone, impliquant plusieurs djihadistes suisses, a récemment été découvert. Le 12 septembre, TF1 annonçait que selon le Service de renseignement français la Suisse est devenue une cible, après l’arrestation d’un terroriste présumé à Thonon-les-Bains, qui faisait partie d’un réseau de recrutement dirigé par une personne originaire d’Orbe, selon Le Temps.
«C’est une guerre qui est dirigée grâce à internet. Sur Twitter, Facebook et sur des blogs», déclare Christina Schori Liang, experte en sécurité au Geneva Center for Securtiy Policy. «Cela a pris de court la communauté internationale. C’est la première guerre numérique que connaît le monde et on ne sait pas comment la combattre. Pratiquement ce qui se passe c’est que des amis discutent ensemble sur internet. Puis l’un d’eux part avec l’Etat islamique et aide l’organisation à recruter les autres. L’Etat islamique ne leur permet pas de revenir, car il les entraîne à devenir des martyrs lors de missions suicide.»
D’autres experts déclarent que bien que des Occidentaux soient décapités lorsqu’une rançon n’est pas payée, ce sont les musulmans modérés qui ont le plus à craindre s’ils s’opposent au califat. Christina Schori Liang, comme d’autres experts, considère que l’une des armes efficaces contre l’Etat islamique est la contre-propagande. Le Centre américain de communication stratégique contre le terrorisme a récemment publié une vidéo dans laquelle on voit des sympathisants de l’Etat islamique faire exploser une mosquée remplie de fidèles et exécuter d’autres musulmans. La vidéo se termine par un message aux candidats au martyre: «le voyage ne coûte pas cher, car vous n’aurez pas besoin de billet retour», puis l’on voit un corps jeté depuis une falaise.
Néanmoins, l’Académie de police de Savatan organisera le 10 octobre un forum sur le thème du «retour des guerres de religion» et sur les moyens d’utiliser internet pour combattre le recrutement djihadiste. Sur son site web, Lorenzo Vidino, expert en sécurité à l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich, défend la thèse officielle selon laquelle la principale activité djihadiste en Suisse consiste à utiliser internet pour recruter des martyrs et pour pirater des banques. Il considère également que la menace djihadiste sur la Suisse est faible «la neutralité suisse ne donne pas lieu à des sujets de griefs politiques.»
Cet article a été publié:Sur le site internet du quotidien fribourgeois «La Liberté».