Déménagement de la bibliothèque des pasteurs neuchâtelois
Photo: Pierre Boher
Propos recueillis par Nicolas Bringolf, «La Vie protestante, Neuchâtel, Berne, Jura»
Compte tenu du peu de temps dont vous disposiez pour assurer la pérennité de la Bibliothèque des pasteurs (BPa), vous avez réalisé un miracle?
Presque! C’est plutôt notre détermination décidée et affirmée qui a bénéficié de rencontres et de circonstances particulièrement favorables: il fallait saisir l’instant. La Société des pasteurs et ministres neuchâtelois (SPMN) s’est en effet retrouvée sous pression au début de l’année 2014. Elle a appris à ce moment-là que la fermeture de la Faculté de théologie, prévue en 2018, était avancée à l’été 2015. A l’origine, le groupe qui planchait sur l’avenir de la BPa aurait pu présenter plusieurs scénarios. Le délai imparti s’étant singulièrement restreint, cette approche n’était plus possible. De surcroît, avec les incertitudes liées à la réaffectation des locaux hébergeant nos collections, nous étions clairement dans une situation d’urgence. Il ne fallait pas traîner pour établir une stratégie viable.
Comment avez-vous empoigné le dossier?
Le groupe «avenir de la BPa» a rapidement défini un objectif primordial. Celui de sauvegarder, dans les meilleures conditions possible, ce trésor patrimonial sur sol neuchâtelois et de garantir son accès à un large public. Puis les membres de la SPMN ont largement validé cette perspective lors d’une consultation écrite. Le bureau de la SPMN a ensuite pris le relais afin d’entamer des discussions avec le Conseil d’Etat.
Pourquoi l’Etat?
Nous considérions que ce fonds, dont de nombreux ouvrages remontent au début du XVIe siècle, appartenait, d’une certaine façon, à tout le canton de Neuchâtel. Nous estimions que l’Etat avait donc un rôle à jouer dans la préservation de ce patrimoine culturel inestimable.
Quel accueil les autorités politiques vous ont-elles réservé?
Dans un premier temps, des rencontres informelles ont été initiées. Le Conseil d’Etat a répondu de manière extrêmement bienveillante à notre démarche. Parallèlement, nous nous sommes approchés de l’Université de Neuchâtel. Depuis 2003, une convention lie la SPMN à l’Alma Mater pour le poste à mi-temps du bibliothécaire de notre fonds. Nous avons aussi approfondi nos relations avec la Bibliothèque publique et universitaire de Neuchâtel (BPUN). L’intérêt manifesté par ces partenaires potentiels a abouti à la création d’un groupe de travail commun.
A quel moment la piste d’une donation a-t-elle germé?
L’idée d’un acte de donation en faveur de la fondation de la BPUN s’est très rapidement imposée. Autant dans l’esprit du groupe «Avenir BPa» que de celui comprenant des représentants de l’Etat, de l’Université, de la BPUN et de la ville de Neuchâtel. Une fois ce scénario ratifié par l’assemblée de la SPMN, tout s’est rapidement enchaîné. La fondation de la BPUN a accepté la donation ouvrant ainsi la voie à la signature d’une convention de donation.
Quand démarre cette convention?
Elle est effective depuis le 1er juillet dernier. L’entrée en propriété et responsabilité est fixée, quant à elle, au 1er janvier 2016. Soit une fois le déménagement de la bibliothèque finalisé.
Qu’est-ce qui vous a le plus marqué durant la mise en œuvre du projet?
La totale convergence de vues entre les partenaires. A aucun moment je n’ai senti la moindre hésitation. L’appui apporté par toutes les autorités politiques et l’Université est également à louer. La concrétisation d’un projet d’une telle ampleur et dans un délai aussi court y est intimement liée.
Après avoir mené à terme cette aventure, quel est votre sentiment le plus profond?
C’est avant tout une grande satisfaction, un grand bonheur que la BPa puisse, à l’avenir, bénéficier des compétences de la BPUN en matière de restauration et de valorisation du patrimoine. C’est aussi l’honneur de la SPMN d’avoir pu maintenir et conserver, tant bien que mal, ce patrimoine exceptionnel.
Un travail de fourmi
Le déménagement d’une bibliothèque recensant quelque 100 000 ouvrages, soit l’équivalent de 2 kilomètres de livres posés sur la tranche, exige rigueur et concentration. «Une telle opération ne se résume pas à mettre des livres dans des cartons», indique Thierry Châtelain, directeur de la BPUN. Il a d’abord fallu établir des critères pour identifier le fonds précieux du reste de la collection. Cette réflexion a abouti à la définition de 1000 volumes. Déterminer leur état sanitaire a été l’étape suivante. «Tous les livres ont été expertisés pour décider s’il était nécessaire de les restaurer», précise Anne Cherbuin, directrice adjointe de l’institution. Le transfert physique à la BPU a constitué la troisième étape. Du moins pour la collection précieuse, puisque le déménagement des 99 000 autres volumes se poursuivra jusqu’à la fin de l’année 2015. (nbr)