Quoi ? Déjà !

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[pas de légende]

Quoi ? Déjà !

Nadine Marschner
11 août 2024
Avons-nous conscience du temps qui passe ? Une Plume d’Erguël de la pasteure de Renan et La Ferrière Nadine Marschner, parue dans la feuille d’avis du district de Courtelary, le vendredi 9 août.

D’un coup il était devant moi, incontournable et mordant : le temps matérialisé. Soudainement mes proches frôlaient des âges qui longtemps étaient restés des abstractions intellectuelles. Quoi ? Maman ? Tu es certaine d’avoir dépassé 80 ans ? Pourquoi ne me l’as-tu pas dit avant ! Comment ? Belle-maman, tu fêtes vos noces de palissandre. C’est du beau bois exotique, non ? Combien d’années de mariage, le palissandre ? 65 ans ! Félicitations !

Le temps matérialisé avait arrêté de se dissimuler dans la frénésie de mes quotidiens. Vous connaissez cela aussi, non ? Il y a tellement à penser. Facile de se laisser entraîner par la cadence des impératifs de nos journées qui se consument. Le temps. Pour quelle raison sa matérialisation provoque-t-elle un tel ébranlement ? Nous le savons, parce que notre temps personnel est limité, circonscrit à nos deux dates propres que sont celles de notre naissance et de notre mort. Certes, mais je n’ai guère envie de soliloquer sur l’existence humaine et sa finitude. J’aime vivre, je veux rester en vie, il faut rester en vie tant que l’on est vivant. N’est-ce pas le message de l’Évangile ?

Avec tout son lot d’histoires, la Bible nous offre un apprentissage. L’apprentissage du bien vivre. A celles et ceux inconsolables face aux divers visages de la perte, la Bible raconte le détachement d’une part confiant et d’autre part collectif. Confiant en ce principe de vie qui échappe à toute spéculation et à toute conceptualisation, principe appelé Dieu pour les intimes de la foi. Collectif en ce sens où il nous regarde en humanité : en nous survivent nos disparu·es d’hier. Il faut « aimer l’autre, mon survivant », écrit P. Ricœur. In fine, notre consigne est simple, avant tout, aimer vivre pleinement jusqu’à la mort et ensuite croire en la force créatrice de l’héritage de cet amour. Il faut que le grain meure pour ne pas rester seul et pour porter beaucoup de fruit, nous enseigne l’évangéliste Jean.