Une force vive
Une joie «toute simple» anime Sylvie Bleuer, caissière pour la paroisse française de Bienne. Son bonheur: être avec les siens.
Dans la cour désertée de la maison Saint-Paul à Bienne, Sylvie Bleuer esquisse avec une grâce solaire quelques pas pour la séance photo: yeux rieurs et allure décidée, en elle, quelque chose saisit. Un souffle de vie, puissant, qui semble l’animer, chassant comme il le peut la douleur, les fantômes, la tentation de sombrer. Et lorsqu’on l’interroge sur la joie constante qu’elle transmet, elle répond: «C’est ainsi, c’est dans mon caractère.» Et de revenir sur sa famille joyeuse, son père, sa mère, des personnes accueillantes: «Nous avions toujours beaucoup de gens à la maison.» Et aujourd’hui encore, elle perpétue cette tradition. Car la gaieté que ressent Sylvie Bleuer ne se garde pas. Elle se partage avec les amis, la famille, les personnes rencontrées et se propage. «On ne peut pas porter la misère du monde. Si j’arrive à soulager la douleur d’une personne, je m’en réjouis.» Son ravissement ne tient pas à grand-chose: s’émerveiller des petites choses, voyager et passer du bon temps avec ses petits-enfants, «un plaisir énorme».
Active depuis trente ans dans l’écoute aux migrants, Véronique Egger, continue à côtoyer des injustices. Sans jamais perdre sa réjouissance d’exister.
Chaque semaine elle découvre des situations inhumaines, mais chaque semaine Véronique Egger retourne échanger avec les migrants, pleine d’espérance, disponible. «Quand je parle aux gens, je ne pense pas à autre chose.» Les idées noires? «Cela ne va pas me servir.» Pour évacuer la colère, «je chante. Je fais partie d’un chœur. Il faut trouver des techniques pour se libérer».
Autre exutoire, «je prends un papier, j’écris à celui-là, là-haut, tout ce que je pense: je l’engueule un coup». Pour ensuite brûler le texte. «Ma joie de vivre est avant tout ancrée dans ma foi», explique celle qui a failli mourir à la naissance, a vécu une paralysie d’un an et bien d’autres épreuves. «Si je n’étais pas croyante, je ne pourrais pas. Il y a des injustices sur cette terre. Mais je suis ici car Dieu m’y a posée, une petite goutte.» Elle s’arrime aussi dans un terreau parental «accueillant et ouvert», une famille «soutenante», des collègues et des amis «avec qui on peut parler et partager. Car personne ne sait tout faire tout seul. Tout seul, on s’enferme».
Geneviève Faillétaz, réceptionniste à DM, compose «joie» de «jeûne», «ouverture», «ici et maintenant» et «espérance».
«Quand les choses sont trop lourdes pour moi, comme c’est le cas en ce moment, j’ai besoin de m’alléger. Je prends donc des temps de jeûne et de prière», explique Geneviève Faillétaz, secrétaire réceptionniste à DM à Lausanne.
Toujours le sourire aux lèvres, elle accueille comme un cadeau, chaque personne qui arrive dans les locaux de DM, organisation active dans les échanges nord-sud et sud-nord: «Je pratique un accueil de l’autre tel qu’il est.»
Quand quelque chose me coupe de la joie, je reçois des petits signes qu’il me suffit d’accueillir. «Dans un parcours, il y a parfois des obstacles, et je me dis, comme en équitation, qu’il ne faut pas les refuser! Vivre les ‹ici et maintenant›. J’y parviens aussi grâce au chant qui m’ouvre à la spiritualité et à l’allégresse… synonyme de joie!»