Islam en Europe: «la laïcité radicale ne correspond pas aux besoins actuels»

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Islam en Europe: «la laïcité radicale ne correspond pas aux besoins actuels»

Joël Burri
13 octobre 2016
Invité dans le cadre de la
Semaine des Droits humains de l’Université de Genève, Yadh Ben Achour appelle les autorités à jouer leur rôle pour défendre les valeurs démocratiques et accompagner l’islam dans sa construction d’un modèle occidental.

«Nous ne sortirons de cette situation que par le dialogue constructif ou la violence», a déclaré Yadh Ben Achour, mercredi soir lors d’une conférence sur l’islam en Europe devant un auditoire de l’Université de Genève bondé. Juste avant, le juriste et ancien président de la Haute instance de la révolution en Tunisie a analysé les phénomènes qui d’une part amènent les descendants d’immigrés à se sentir de moins en moins intégrés à mesure qu’ils gagnent en sécurité juridique dans les pays d’accueil— ce qui en fait des cibles pour la radicalisation— et d’autre part les phénomènes de résistance qui se cristallisent en occident et l’amène à bafouer ses propres valeurs d’accueil et de liberté.

Yadh Ben Achour a ensuite proposé trois conditions nécessaires pour que le dialogue constructif puisse avoir lieu: outre la défense des valeurs de la démocratie; «l’islam doit s’adapter à l’Europe alors que l’Europe doit s’adapter à l’islam.» Ainsi, le chercheur défend un «islam des Lumières» où morale, droit, religion et justice ne se confondent pas. «En occident, les crispations des musulmans sur quelques mêmes thèmes, maintiennent les musulmans en marge de la société», prévient le juriste qui appelle, en particulier les musulmans à reconnaître le droit individuel à la liberté de conscience.

D’autre part, il appelle l’Europe sécularisée, non seulement à défendre plus sérieusement les droits des personnes pratiquantes—«même si cela heurte son sens de l’esthétique»—, mais surtout les autorités européennes doivent jouer un rôle actif pour garantir établir des conditions d’expressions de l’islam.

«Le drame de l’islam, c’est qu’il n’a pas eu son Eglise catholique», sourit-il. Un mouvement de réforme interne ne s’y est pas développé amenant une longue réflexion sur les relations entre Etat et Eglise. Cette réforme doit donc être accompagnée. «La laïcité radicale où l’Etat est totalement passif en ce qui concerne questions religieuses, ne correspond pas aux besoins actuels. Nous ne sommes plus en 1905», prévient Yadh Ben Achour. «Le reconnaissance et la liberté religieuses ne peuvent se faire que sous une autorité publique», les Etats doivent donc assumer leur rôle, ce qui n’est pas incompatible avec les principes généraux de la laïcité.