Comment prier face au coronavirus ?
La question vous paraîtra peut-être saugrenue ! Elle part d’un constat très subjectif de ma part : je sens qu’il ne suffit pas de prier pour la santé de mes proches, la santé du pays ou la santé du monde… et je ne suis pas à l’aise avec l’idée de prier contre le virus, comme s’il s’agissait d’une puissance ténébreuse à combattre au nom du Christ. Je cherche donc une troisième voie…
Comme le rappelle l’article de Wikipédia concernant le Jeûne Fédéral, les chrétiens du passé avaient encore une autre corde à leur arc : le retour au Seigneur, qu’on exprime souvent par le mot de « repentance » ou « pénitence » (deux mots qui ont malheureusement une connotation très sombre) :
« Les journées de prière et de pénitence du christianisme tirent leur origine de la Bible. Au Moyen Âge, ces journées sont ordonnées par les autorités en certaines circonstances. Les raisons qui motivaient de telles célébrations étaient fort diverses : guerres ou menaces de conflits, maladies et épidémies, cataclysmes naturels, perspectives d'avenir très sombres, etc. »
Dans cette période de pandémie, l’Eglise ne peut pas se borner à suivre les recommandations sanitaires. Elle est porteuse d’une Parole qui interpelle et ouvre un chemin.
Qu’est-ce que la « repentance » ?
D’après le sens du terme en hébreu (techouva), il s’agit d'un mouvement de « retour » vers Dieu. D’après le terme grec (metanoia), il s’agit d’un « changement » d’état d’esprit, d’attitude profonde, de priorités.
Face à cette crise, aurions-nous à vivre nous aussi une démarche de retour au Seigneur, pour lui demander son pardon et pas seulement son aide ? Je le crois ! Et je vois plusieurs domaines qui requièrent notre techouva/metanoia :
Notre relation à la création est profondément faussée: l’apparition de ce virus est l’un des symptômes de la nature qui souffre et se dérègle parce qu’elle est malmenée par l’humanité. Cette pandémie n’est pas un jugement de Dieu mais un « éternuement de la nature » ! (Vincent Fernandez). Notre metanoia nous conduira alors au « respect de la création », à la « sobriété heureuse » ou à la « transition énergétique ».
Notre relation à Dieu est elle aussi tordue: nous lui accordons tout au plus les miettes de notre attention et de notre temps. Notre techouva prendra ici la forme d’un choix fondamental : « Ou bien la faim de Dieu est le soleil autour duquel j’organise tout ; ou bien Dieu est un objet entre autres qui tourne dans le ciel très encombré de ma vie » (André Sève). « Tu vas faire de lui une priorité ! » (Hetty Overeem). « Cherchez d’abord le Royaume de Dieu et sa justice ! » (Jésus).
Veillons à ne pas instrumentaliser Dieu dans cette démarche : nous ne revenons pas vers lui pour raccourcir la pandémie ou la crise économique qu’elle génère. La seule raison d’aimer Dieu, c’est Dieu lui-même !
En nous tournant vers Dieu, la techouva/metanoia nous permet de revenir à notre condition humaine. Cette pandémie devrait nous "humilier" dans le sens de nous rendre humains (c'est la même étymologie !). « S’humilier », ce n'est n'est pas se rabaisser ou se dénigrer, mais simplement reconnaître que nous sommes des hommes et non pas Dieu. Rappelons-nous que la tentation fondamentale de l'homme est de "devenir comme Dieu" (Genèse 3). La volonté de tout prévoir, tout organiser, tout maîtriser et tout guérir nous éloigne de la véritable condition humaine, qui est de « marcher humblement avec notre Dieu » (Michée 6,8).
Face à l’ampleur de cette pandémie, un retour à Dieu s’impose. Il saura nous montrer, lui, dans quels domaines de nos vies - personnelles, communautaires ou sociales - il est urgent de vivre un changement d’état d’esprit, de priorités et de comportement.