Laisser travailler la vie - en hiver 3: Enfantement en perspective…
Voici Noël : assurément un plus de lumière après le solstice d’hiver… Mais vraiment un plus de paix et de bienveillance, en période de crises, d’improductivité et d’injustices ? Qu’est-ce qui a commencé, en fait ? Pas seulement la course du soleil d’un solstice d’hiver à un nouveau solstice d’été, pas seulement le culte païen d’un Soleil invaincu ! Et pas seulement non plus une vie d’un enfant et d’un homme d’il y a 2000 ans, ayant porté le nom de Jésus !
C’est pourtant bien de lui qu’il s’agit, maître thérapeute dont les paroles et les gestes se résument dans cette proclamation : «Paix sur terre, bienveillance aux humains !», des mots (hébreu «shalom» ou grec «eirenè») qui indiquent une grossesse du monde, un enfantement, une promesse de vie allant s’épanouir. Mais dans les crises de l’hiver, qui la verra se lever ? Qui va, dans la course de son travail, stopper et redémarrer ?
Si nous ne mentons pas avec des mots creux, cette ouverture d’un temps pacifique et prospère, cette nouvelle création, doit orienter tous nos engagements et notre travail. Car c’est bien un enfantement en perspective – et non pas déjà accompli ni abouti – que les disciples de Jésus saluent et célèbrent à Noël : «une année de grâce», la 2019ème, qui va nous donner l’élan et l’horizon pour investir et travailler… dès la fin des festivités.
D’emblée, Jésus a clamé : « Votre attente va finir » (en termes hébreux : «les temps sont accomplis», ses premiers mots selon l’évangile de Marc). Reste pourtant que, depuis lors, le temps met des siècles à finir, alors que Jésus nous a appris à soupirer : « Que ton Règne vienne! »
Il va donc arriver, ce règne, cette efficacité accomplie, qui nous porte en avant… même si l’hiver dure et si les maux perdurent ! La fin de la même prière salue ce règne, cette puissance et cette gloire pour «les siècles des siècles» : pour demain et jusqu’au bout, elle dit l’efficacité du Père créateur, l’empire de la Parole du Fils et l’éclat de l’Esprit saint, enfantant la vie.
Ici grossit une nouvelle naissance contre tous les échecs ; ici mûrit un épanouissement après toutes les improductivités ; ici germe une bienveillance malgré des siècles d’injustices. Le monde est loin d’avoir vu naître sa forme véritable : il est en enfantement, et ce travail est dur, lourd de gémissements, de résistances et de plaintes. Nous en portons notre part.
Du coup, notre productivité économique et notre organisation sociale ne doivent pas seulement fonctionner, mais tendre à réussir, achever une transition encore bien imparfaite au service de la vie, ouvrir d’urgence une page d’histoire différente. Seul l’épanouissement du monde justifie nos investissements, personnels et financiers : car notre vie économique ne nous appartient pas, elle appartient à l’enfantement promis du monde, et nos travaux nous dépasseront donc toujours.
« Laissez travailler la vie ! » C’est ce qu’apprend une femme en travail : cette respiration haletante qui accompagne une force indépendante d’elle, qu’elle suit avec retenue et vigilance.
« Paix sur vous ! » : proclamation de Jésus thérapeute, disant que l’enfantement de la plénitude est en train de se faire. Avec vigilance, nous allons pouvoir y travailler.