La nativité: un récit de migration

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La nativité: un récit de migration

Myriam Bettens
17 décembre 2018
Le temple de Plainpalais à Genève accueillait dimanche une relecture de la Nativité sous l’angle de la fuite et de la migration. Invités, les requérants d’asile et les réfugiés étaient mis à l’honneur.

«Cette peur d’être détrôné n’est-elle finalement pas source de beaucoup de discriminations?», se demande un participant présent à la fête de Noël du Lab, l’espace de l’Église protestante de Genève (EPG) pour les jeunes adultes en recherche de sens et de spiritualité. «Rien n’a changé, des personnes continuent de fuir la tragédie et c’est une question de survie», répond la pasteure Carolina Costa, à la réflexion qui vient d’être soumise, ce dimanche 16 décembre au temple de Plainpalais à Genève.

Sur le modèle des cultes participatifs proposés régulièrement par le Lab, la soixantaine de personnes présentes était invitée à partager leur compréhension du texte de la nativité. Un récit dans lequel une famille fuit sous la menace pour se réfugier dans un pays étranger et potentiellement hostile. Pour la pasteure, ce récit n’est pas uniquement le texte fondateur du christianisme, «le messager, envoyé de Dieu, vient aussi ancrer le droit à la protection des réfugiés.» Dieu légitime donc lui-même la fuite afin de «sauver le peu d’humanité qu’il reste encore», affirme Carolina Costa. Pourtant, comme le relevait un jeune homme, ces réfugiés ne sont pas toujours accueillis comme cela devrait être alors qu’ils «ne viennent jamais les mains vides.»

«J’ai quitté mon pays pour les mêmes raisons que Jésus»

«Vous nous apprenez toujours quelque chose», certifie la pasteure à l’adresse des familles de requérants assises dans la salle. Carolina Costa invite ensuite chacune de ces personnes à se lever pour enseigner aux autres la manière de dire «bienvenue» dans sa langue. Anne s’est aussi levée, cette Kényane a accepté de partager son parcours de vie avec l’assemblée. «L’important n’est pas que je vienne du Kenya. Où que je sois est l’endroit où je dois être», explique la femme face aux nombreux visages attentifs. «Si je vous racontais mon histoire, vous seriez perplexes, mais j’ai quitté mon pays pour les mêmes raisons que Jésus», continue-t-elle. Cette période de l’année lui rappelle que le Christ est né pour elle, et «il doit aussi naître en vous», lance-t-elle aux participants. Expérimenter la bonté de Dieu jour après jour a aidé Anne à avancer, «il est la raison de mon sourire.» Un témoignage qui sonnerait presque comme une exhortation: «On parle souvent des atrocités que les réfugiés ont dû subir et beaucoup moins de ce qui les a fait tenir», précise Carolina Costa. Elle complète, «il était beau d’honorer la confiance et la résilience qu’on retrouve chez nombre de réfugiés.»

Un mot pour dire le message évangélique

La pasteure ne voulait pas uniquement honorer la capacité de résilience des réfugiés face aux épreuves de la vie. «Nous voulions simplement leur dire qu’ils sont un cadeau pour nous», développe-t-elle et cette volonté s’est traduite par une Sainte-Cène particulière. Au lieu du traditionnel pain et vin, chacun reçoit une bougie dont la mèche est allumée par une autre personne. «Cette année, j’ai envie de vous inviter à devenir le cadeau de lumière de quelqu’un d’autre», expose Carolina Costa. Une manière de signifier que «dans tous ces moments de chaos une lumière peut s’allumer», conclut-elle alors qu’une nuée de petites flammes commence à se répandre dans le temple de Plainpalais.