La «Nuit des Eglises» franchit (tout juste) le Röstigraben

Céline Ruffieux (représentante de l’évêque pour la partie francophone du canton de Fribourg), Martin Burkhard (Martin Burkhard, membre du Conseil synodal (exécutif) de l’Eglise évangélique réformée du canton de Fribourg) et Tanja Brayenovitch-Hari, adjointe de la déléguée épiscopale, lors de la conférence de presse du 26 mai.. / DR
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Céline Ruffieux (représentante de l’évêque pour la partie francophone du canton de Fribourg), Martin Burkhard (Martin Burkhard, membre du Conseil synodal (exécutif) de l’Eglise évangélique réformée du canton de Fribourg) et Tanja Brayenovitch-Hari, adjointe de la déléguée épiscopale, lors de la conférence de presse du 26 mai..
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La «Nuit des Eglises» franchit (tout juste) le Röstigraben

Ce vendredi 2 juin, Fribourg sera le premier canton romand à se rallier à la manifestation nocturne qui a lieu simultanément dans plusieurs pays d’Europe, dont la Hongrie, l’Estonie ou encore l’Autriche depuis bientôt vingt ans. Un cap en direction de la Romandie?

«Les Eglises sont bien plus que des bâtiments: ce sont des lieux de rassemblement», entonne Céline Ruffieux, représentante de l’évêque pour la partie francophone du canton de Fribourg, au moment de présenter le programme de la «Nuit des Eglises», qui se tiendra ce vendredi 2 juin. Pour la première fois, en effet, les Eglises catholiques et réformées du canton de Fribourg participeront à l’événement, qui se déroule simultanément dans onze cantons alémaniques, mais aussi différents pays d’Europe comme la Hongrie, l’Estonie ou encore l’Autriche depuis bientôt vingt ans.

Sur le modèle de «La nuit des musées», la manifestation vise à faire découvrir les Eglises sous un autre jour. «A la tombée de la nuit, d’autres perceptions nous sont accessibles», formule le pasteur Martin Burkhard, membre du Conseil synodal (exécutif) de l’Eglise évangélique réformée du canton de Fribourg (EERF). «La nuit certains lieux résonnent autrement.»

Et pour cause: car si certaines Eglises proposent des activités proches de leurs animations habituelles (concerts, visites de la bâtisse, etc.), d’autres ont choisi la carte de l’insolite, entre chasse au trésor, bar à gaufres, soirée cinéma ou encore construction avec 14'000 dominos. En tout, plus de 100 événements sont à l’affiche de cette première édition fribourgeoise, répartis dans une trentaine de lieux à travers le canton.

Des lieux à vivre

Si la manifestation est portée de manière œcuménique par les deux Eglises cantonales, chaque paroisse reste libre de sa proposition, en fonction tant de ses envies que de ses ressources. Martin Burkard se réjouit de l’accueil manifesté au sein des différentes communautés locales. «Les gens ont répondu avec enthousiasme et se sont largement mis en route pour offrir quelque chose de différent. Même une petite paroisse comme Romont, qui dispose de peu de forces, ouvrira ses portes et offrira une soupe aux visiteurs», relate-t-il.

D’ailleurs, pour le pasteur réformé, l’idée n’est autre que «de s’ouvrir à un public plus large», d’accueillir les personnes «qui n’osent pas entrer dans ces lieux, qui n’en ont pas l’habitude ou n’y sont pas revenues depuis longtemps», poursuit Céline Ruffieux. En soi, créer du lien, parce que précisément, «les Eglises ne sont pas des musées, mais bien vivantes», résume-t-elle.

Romandie peu représentée

Baptisée en allemand la «Longue nuit des Eglises», le rendez-vous en est à sa 4e édition en Suisse – l’Autriche à sa 19e. Venu de l’est, il a été instauré dans le pays par les Eglises argoviennes, puis s’est peu à peu répandu outre-Sarine, de Zurich aux Grisons, en passant par Bâle, Lucerne ou encore Zoug.

La Romandie est encore peu représentée. En effet, aujourd’hui, seul le canton de Fribourg ainsi que quelques églises du Jura et du Jura bernois (Corgémont et Porrentruy) ainsi que de la partie francophone du canton de Berne (Bienne) participent à l’événement. Un cap franchi manifestement grâce au bilinguisme de ces cantons, dont «les Eglises ont pu fournir un grand travail de traduction, notamment pour le site Internet», souligne Martin Burkard, qui espère que la participation fribourgeoise fasse des émules en Suisse romande. Son pronostic personnel pour l’avenir? «Vaud dans deux ans, Genève dans quatre ans», émet-il, en référence au cours du Rhône.

L’exception vaudoise

Le canton de Vaud a pourtant connu sa Nuit des Eglises pendant une dizaine d’années, souligne le pasteur Frédéric Keller, responsable de l’œcuménisme pour l’Eglise évangélique réformée vaudoise (EERV). «La version vaudoise se tenait principalement à Lausanne, et cela a montré ses limites», renseigne-t-il. Il n’y aura d’ailleurs pas de Nuit des Eglises cette année dans le canton. «Faute de bénévoles pour accueillir les visiteurs, la manifestation s’est essoufflée. Ce type de projets vit uniquement des gens qui les pensent et les portent», souligne-t-il.

L’an passé, une nouvelle mouture optait pour une évolution de la manifestation en différents rendez-vous centralisés sur la place de l’Europe. Une proposition qui ne sera pas reconduite en l’état, relève Frédéric Keller. Une adhésion à la manifestation venue de Suisse alémanique serait-elle alors envisageable? «Porté jusqu’ici par la Communauté des Eglises chrétiennes dans le canton de Vaud (CECCV), ce genre de manifestation dépendra désormais du futur Forum chrétien vaudois, dont le comité sera mis en place le 1er juin prochain.»

Inspirée par ces rendez-vous nocturnes, l’Eglise protestante de Genève (EPG) a pour sa part lancé sa première édition d’une «Nuit de la prédication», le 30 septembre dernier à la cathédrale Saint-Pierre. Une vingtaine d’orateurs et oratrices s’y sont succédé jusqu’au petit matin. A Neuchâtel, l’idée de mettre la nuit au service des Eglises serait également étudiée, «avec le vœu de la faire néanmoins se conjuguer avec un temps de fête liturgique» , indique Frédéric Keller. Pour l’heure, un consensus romand n’est visiblement pas à l’ordre du jour. Affaire à suivre.