Un tableau central dans l'histoire du protestantisme
24 août 1572. C’est la date du «massacre de la Saint-Barthélemy», à Paris, qui se déroule en réalité sur trois jours. Des milliers de protestants pris au piège dans une ville aux portes fermées sont assassinés. L’épisode se déroule en pleine guerre des religions.
L’œuvre présente au Musée cantonal de Lausanne a été peinte par François Dubois, artiste protestant réfugié à Genève, entre 1572 et 1584, soit peu de temps après les événements. Elle est unique du fait que l’artiste, aurait, sans que les historiens puissent l’assurer avec certitude, été un témoin direct de l’événement… et donc d’une ou de certaines scènes représentées sur le tableau, faisant de l’œuvre «un travail de témoignage, démarche rare à l’époque», explique-t-on auprès de la médiation culturelle du MCBA.
En effet, peu de représentations aussi contemporaines de l’événement existent. C’est ce qui explique que l’œuvre, bien qu’éminemment subjective, est devenue, avec le temps, l’image emblématique de ce massacre et des guerres de religion au XVIe siècle en général. Elle figure depuis des décennies dans la plupart les livres d’histoire qui traitent ce sujet.
Scène de théâtre
Ce qu’on y voit? D’abord un décor, qui représente plusieurs bâtiments emblématiques du Paris de l’époque (La Seine, à droite, le faubourg Saint-Germain, à gauche, l’église des Grands-Augustins aujourd’hui disparue, la porte de Buci, intentionnellement fermée, Le Louvre, la maison de l’amiral de Coligny, alors chef du parti protestant…). Il s’agit bien entendu d’une représentation irréaliste, symbolique, qui a pour but de placer le spectateur «comme face à une scène de théâtre». Sur cette scène, une série de massacres sordides, des victimes suppliantes, désarmées et seules face à des hordes lourdement équipées, une Seine débordante de cadavres. Au centre, l’assassinat de l’amiral de Coligny par le duc de Guise, en trois étapes: défenestration, décapitation, émasculation. À l’arrière-plan, Catherine de Médicis elle-même, contemplant un tas de cadavres. Un important débat hagiographique sur la responsabilité de cette figure centrale du pouvoir politique et de la famille royale dans ce massacre a ensuite eu lieu.
Au milieu, une figure se détache: un gentilhomme en rouge, vêtu d’une cape et d’un chapeau, semble pris d’effroi. Certains y voient un catholique, placé ici par l’artiste pour rappeler que le conflit était avant tout basé sur des oppositions politiques, et que tous les croyants n’étaient de loin pas remplis de haine…
Expositions
Rien que pour vos yeux #2 Les plus belles estampes des collections.
Jusqu’au 5 janvier, musée Jenisch, Vevey. Dürer, Rembrandt mais aussi Picasso, et d’autres sont à découvrir sous un nouveau jour. Beaucoup d’oeuvres invitent à réfléchir sur le temps qui passe, la mort, la mélancolie. www.museejenisch.ch
Le Siècle oublié, Fribourg, les années 1 300. Jusqu’au 23 février au Musée d’art et d’histoire. Plongée dans l’histoire de la cité au XIVe siècle, période capitale dans la formation de la ville notamment sur le plan architectural et religieux. Au long de la durée de l’exposition des concerts, des ateliers, l’accès, du 1er au 16 janvier, à des peintures cachées dans la cathédrale Saint-Nicolas. www.fr.ch/mahf.