Les Journées de Soleure révèlent un cinéma suisse en quête de sens

Conférence de presse de la 54e édition des Journées de Soleure. / ©moduleplus.ch
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Conférence de presse de la 54e édition des Journées de Soleure.
©moduleplus.ch

Les Journées de Soleure révèlent un cinéma suisse en quête de sens

Patricia Dickson (Ref.ch/Protestinfo)
30 janvier 2019
La 54e édition du Festival du film Journées de Soleure, qui se déroule jusqu’au 31 janvier, met en lumière une scène cinématographique suisse qui traite de la religion et des questions de sens.

La religion vit une petite renaissance aux Journées de Soleure. À l’affiche de la 54e édition du Festival du film dédié à la scène suisse, un nombre impressionnant de films sur la religion, la spiritualité ou qui interrogent le sens de la vie sont présentés. «Nous savions que le film Zwingli du réalisateur Stefan Haupt serait projeté, mais nous ne nous attendions pas à une telle accumulation de thématiques religieuses», lâche Seraina Rohrer, directrice du Festival. Le thème a émergé assez accidentellement.

Parmi les 165 films que compte la sélection, ce ne sont pas moins de treize d’entre eux qui abordent des questions religieuses. «La liste n'est pas complète, précise Seraina Rohrer. Mais cela montre à quel point les cinéastes, dans leur diversité, s’attachent aux questions de sens dans leurs œuvres.» Le spectre de ces films est aussi large que la définition de la religion. Il va de l'épopée historique de Zwingli au drame de Simon Jaquemet L'Innocent, qui se déroule dans un milieu évangélique, en passant par des films poétiques et esthétiques comme Le voyage de Bashô et Architecture of Infinity.

Du cinéma d’auteur au blockbuster

Ces dernières années, ce sont des grands thèmes comme ceux de l’exil, de la migration ou des drames personnels, qui se jouent derrière des portes closes, qui ont dominé les Journées de Soleure, rappelle Seraina Rohrer. «Nous vivons une époque dans laquelle il est important de se demander quelle direction on veut donner à sa vie», note la directrice du Festival, expliquant le nouvel intérêt des cinéastes pour les questions de foi. Natalie Fritz, spécialiste du cinéma et des médias, partage ce point de vue: «La mondialisation et la migration créent de l'insécurité dans le monde entier, et les gens ont soif de sens». Elle observe depuis longtemps déjà la tendance qu’ont les cinéastes à se consacrer de plus en plus aux questions existentielles. Cantonnées initialement au cinéma d’art et d’essai indépendant, la religion et la spiritualité ont finalement accédé au grand écran avec des blockbusters tels que Le Pape François, un homme de paroles de Wim Wenders ou Zwingli de Stefan Haupt.

«Le cinéma est plus libre que l'Église»

«La salle de cinéma devient davantage un lieu de réflexion», affirme Natalie Fritz. Le cinéma a selon elle un avantage certain sur l'Église: «Le cinéma est plus libre que l'Église.» Les cinéastes ne sont liés à aucune règle ni à aucune tradition institutionnalisée. C'est dans leur liberté individuelle que réside la manière dont ils mettent en scène une thématique.

Par exemple, le réalisateur danois Lars von Trier aime se présente comme un catholique converti. Mais dans ses films, il ne s’y laisse pas enfermer, observe Natalie Fritz. Bien que ses récits jouent avec le catholicisme, ils ne reflètent pas nécessairement la doctrine romaine. Une autre force du cinéma réside dans sa technique narrative: «Le film a la possibilité de fixer visuellement un cadre, ce qu'on appelle un cadrage», explique Natalie Fritz. Les cinéastes montrent aux spectateurs de nouvelles perspectives en tenant consciemment la caméra sur une partie de la réalité ou une réalité potentielle dans laquelle ils veulent emmener le public. Dans un monde confus, le cinéma est un médium qui peut interroger des valeurs telles que l'humanité ou la charité et fournir une orientation sans avoir à proposer des solutions immédiates.

«Aujourd'hui, de plus en plus de films osent aborder des questions complexes, précisément parce qu'il n'y a pas de réponses claires, explique Seraina Rohrer, directrice du Festival. C'est attirant pour les artistes. Le film ne cherche pas des réponses absolues. Il s'agit d’un défi, celui de réfléchir à des questions existentielles et d'ouvrir de nouvelles perspectives.» Il revient donc au spectateur de trouver ses propres réponses.