Le mariage pour tous cache-t-il le «droit à l’enfant»?

©iStock/Aleksandar Georgiev
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©iStock/Aleksandar Georgiev

Le mariage pour tous cache-t-il le «droit à l’enfant»?

Par Suzette Sandoz
1 septembre 2019

Ce n’est pas une question d’abord religieuse, à mon avis, mais simplement humaine: le mariage est, depuis des siècles, une institution liée à l’idée de filiation. Les religions en ont, les unes et les autres, fait une institution plus ou moins sacrée, mais c’est indépendamment de toute question religieuse que les sociétés l’ont organisé, dans l’idée d’assurer, voire de protéger la transmission générationnelle. Symbole de la filiation, le mariage a toujours été pensé et conçu comme une institution de continuité de vie. Pour que la vie continue dans le temps, il faut en tous les cas une rencontre hétérosexuelle. Il fallait donc protéger les unions mono- ou polygames seules capables d’assurer la survie. Conséquence: Le mariage ne concerne— et depuis des siècles— que des relations hétérosexuelles.

Ce lien symbolique, vieux comme le monde, entre mariage et filiation, est naturellement rompu si le mariage est ouvert à tous. C’est là qu’apparaît le besoin d’une réflexion.

Qu’est-ce qu’un «vrai» mariage pour tous?

Un article en p. 3 du journal «le Temps» du 31 août 2019 nous informe que «la Commission des affaires juridiques du Conseil national approuve le concept de mariage entre couples homosexuels. Elle refuse cependant l’accès des couples lesbiens à la procréation médicalement assistée». À cause de cette exclusion, le même article nous apprend que le projet est «vivement critiqué par les associations LGBT». Et le même article toujours de rapporter l’expérience lourde d’un «point de vue sanitaire et financier» qu’a vécue la directrice romande de Pink Cross pour avoir un enfant avec sa compagne. Elle a dû se rendre en Espagne pour recevoir un don de sperme et suivre le traitement médical nécessaire. Cette personne aurait en outre déclaré: «Soit nous obtenons un vrai mariage pour tous, égal à celui dont bénéficient les hérétosexuels, soit ce n’est pas la peine. Nous donner un sucre pour que les revendications se taisent, c’est nous prendre pour des idiots. Se marier sans pouvoir bénéficier des facilités accordées aux autres couples par rapport à la procréation et à la reconnaissance des enfants n’a pas de sens».

En deux mots comme en cent, un «vrai» mariage donnerait «droit» à l’enfant. Certes, la loi suisse actuelle sur la procréation médicalement assistée accorde à un couple marié (hétérosexuel, évidemment) et à lui seulement le droit de recourir à un don de sperme. La loi précise qu’elle prend en compte l’intérêt de l’enfant! Elle ne consacre pas un droit à l’enfant.

 

La responsabilité des chrétiens et de l’Église est engagée

De l’aveu même des milieux LGBT, le mariage pour tous doit avant tout ouvrir le droit à l’enfant. Le problème n’est pas d’accorder aux couples de même sexe la même protection financière, successorale, fiscale, administrative qu’aux couples mariés, toutes ces questions pourraient être résolues aisément par une adaptation législative du partenariat enregistré. Mais ce que veulent certains milieux LGBT, c’est avant tout l’égalité par le droit à l’enfant. Et comme il est exclu qu’ils puissent avoir un enfant en couple, il leur faut recourir à la procréation médicalement assistée. On parle d’abord de don de sperme pour un couple de femmes, puis, au nom de l’égalité, on parlera d’un don d’ovule et de mère porteuse pour un couple d’hommes.

La vraie question éthique et morale à résoudre aujourd’hui est celle de l’utilisation du «mariage pour tous» pour légitimer un droit à l’enfant. Le débat ne doit pas être renvoyé à une modification ultérieure de la loi sur la procréation médicalement assistée. Il doit être abordé hic et nunc sans hostilité, mais avec lucidité et un brin de courage, car il n’est pas politiquement correct.