Le 21 janvier paraissait dans La Croix un article du sociologue et historien au CNRS Sébastien Fath intitulé « Wokisme et christianisme ». Wikipédia nous apprend que le wokisme désigne ces mouvements récents qui dénoncent les discriminations sociales. Fath cite les mouvements « woke » les plus connus que sont Black Lives Matter et MeToo. Bien entendu que la lutte contre les discriminations n’a pas attendu l’émergence de ce néologisme. La lutte contre la ségrégation raciale menée par Luther King, l’action de l’abbé Pierre ou celle des activistes LGBT relèvent d’un wokisme avant l’heure.

Selon S. Fath le wokisme vise à « ...étendre le domaine de la justice à celles et ceux qui sont restés dans les angles morts de la vision des dominants. » Le chercheur en trouvant des précurseurs chez un Voltaire défendant Calas et plus récemment chez des penseurs comme Derrida, Deleuze et Foucault donne une sorte d’épaisseur historique à ces mouvements de contestation récents. En tant que théologien comment ne pas faire le lien avec l’histoire de l’Église qui dès son apparition n’est qu’une succession de mouvements contestataires et en ce qui nous concerne contestation d’un ordre hégémonique qui accouchera de la Réforme.

Le piquant de l’affaire est que le mot woke vient de l’argot afro-américain pour désigner l’état de veille ou « awake », éveillé et en alerte quant aux discriminations et autres dénis de justice.  Le Christ appelait à veiller, attendre, scruter. Au XIX siècle les mouvements du Réveil --spirituel cette fois-ci et non social-- se réclamaient aussi de la prise de conscience face à une Église jugée endormie sur ses privilèges. L’Église est-elle fondamentalement et irrémédiablement condamnée au wokisme ? De par le message radicalement contestataire de son nazaréen de chef, j’ai l’impression que pour lui rester fidèle elle ne peut vraiment pas faire autrement.  Je ne peux m’empêcher de faire le lien entre ces mouvements dénonçant des injustices flagrantes et le prophétisme biblique dont il me semble que Jésus fut l’héritier.

Richard Falo