Autant d’opinions que de protestants
A l’occasion de la dernière opinion publiée par l’agence de presse Protestinfo, Joël Burri, son rédacteur responsable réfléchit à la spécificité de la pensée protestante.
Que pensent les protestants? Depuis septembre 2010, Protestinfo essaie de répondre à cette question au travers d’articles d’opinion proposés plus ou moins une fois par semaine. A quelques jours du lancement de la nouvelle formule de Réformés.ch, nous avons décidé de mettre fin à cette pratique. Les articles d’opinion seront désormais publiés sur ce nouveau site, alors que Protestinfo tendra à coller davantage à son rôle d’agence de presse en privilégiant l’actualité.
Ce dernier édito sur Protestinfo.ch me donne donc l’opportunité de revenir sur une question de fond: existe-t-il une pensée spécifiquement protestante? A en croire la diversité des opinions exprimées en 7 ans de chroniques, on serait tenté de répondre non. D’ailleurs le journaliste spécialisé que je suis expérimente trop souvent cette réponse: «Je ne peux pas m’exprimer au nom des protestants, je m’exprime en mon nom propre.»
Le fait d’avoir des valeurs partagées n’entraine-t-il pas l’adhésion à des opinions communes? Pas vraiment, car le protestantisme s’est surtout construit sur sa multiplicité et la remise en question d’une autorité ecclésiale. Bref, la Réforme a valorisé l’individu, voire l’individualisme. Conséquence directe, les protestants n’existent pas dans les médias, ou alors uniquement comme experts d’un domaine particulier, comme l’a démontré le sociologue Philippe Gonzalez à l’occasion des 15 ans de Protestinfo.
Mais cette absence de vision collective ne signifie pas que les protestants n’appuient pas parfois leurs opinions sur leurs convictions. L’exercice n’est pas toujours bien maîtrisé, amener un argument de foi a souvent comme conséquence de clore le débat. Que répliquer à un «je suis contre, parce que je crois que telle est la volonté de Dieu»? Les débatteurs les plus motivés tenteront certainement de remettre en cause l’exégèse qui amène à une telle compréhension de la volonté divine, mais souvent en vain.
Toutefois assumer les positions que l’on entend défendre, et en présenter les conséquences pratiques permet aussi, de clarifier le débat. J’apprécie quand les orateurs disent d’où ils parlent et assument leur point de vue en toute transparence, et ceci tant face à un coreligionnaire que face à un opposant. Car là est la vraie difficulté: assumer la divergence sans céder à la communication qui pousserait à lisser le discours pour donner une vision idéalisée et fraternelle de l’Eglise. Et c’est ce défi que Réformés.ch va devoir relever. Je me réjouis de lire cette multiplicité d’opinions.