Suivre, ce sera l'inquiétude, pardi !
Vous vouliez bien faire une pause, la prendre en bien, «suivre»… comme disait Jésus. C'étaient les vacances de la Pâque : pourquoi pas aller à Jérusalem ? Aujourd'hui, on fait la pause pour prévenir l'infection : pourquoi pas quitter le quotidien ! - Mais Jésus vous avertit : ce ne sera pas une partie de repos, car on va vers l'inconnu et l'inquiétant, la discontinuité économique et sociale. Même à Pâques ! «Les renards, dit-il, rentrent aux tanières et les oiseaux aux nids. L'Humain, lui, n'a pas d'endroit où coucher sa tête !» (Luc 9,58)
Même la marche vers l'Humain hors du quotidien, la manifestation d'un retrait et d'une prudence, ce n'est pas l'assurance d'être tranquille : tout restera toujours à reprendre, même en compagnie de l'Humain que Jésus incarne et nous fait suivre. La prière qu'il a proposée s'achève d'ailleurs sur le cri : «Ne nous laisse pas entrer en crise !» (la «tentation» c'est la «crise», et Luc 11,4 arrête la prière sur ce mot).
La crise et l'inquiétude, l'économie en a bien conscience et son travail tente de la prévenir activement en nous y impliquant par nos travaux. C'est comme si autour de nous la création était hostile, sans tanières ni nids. L'économie sous pression marche sans repos... Est-ce au moins dans les pas de l'Humain ?
Nous aussi voulions marcher crânement en pensant au succès. Il nous avait pourtant avertis : on ne se couchera pas, on ne prendra pas de repos, on risque de courir longtemps, et ce sera fatiguant d'atteindre à l'Humain, à sa royauté efficace sur tout le pays, depuis la Galilée au départ jusqu'à la Judée à l'arrivée, aujourd'hui depuis la Chine jusqu'aux Nations Unies… et au coeur du monde. La marche a commencé : aboutira-t-elle ?
Nous tentons en effet tous d'être actifs, de prévenir les manques, les crises ou les infections, d'avoir du succès, et peut-être avec Jésus de marcher vers la capitale où on fera la fête. Ce sera la Pâque ? Oui, mais pour lui, ce sera la fin, comme s'il l'avait pressenti ! Pas d'endroit pour coucher sa tête… sinon un tombeau !
Mais l'Humain (en hébreu «Fils d'homme») ne meurt pas ainsi : c'était juste son chemin… passant par les mains du grand-prêtre et du chef des occupants, Ponce Pilate, qui l'a condamné à la croix. L'Humain n'a pourtant pas dit son dernier mot au tombeau, et les amis marcheurs ont pu le découvrir trois jours plus tard.
Oui, l'Humain s'était annoncé : l'avertissement de Jésus a confirmé qu'il vient et marche et qu'il reste une promesse, même sans endroit où s'arrêter, et même trois jours après l'irrémédiable. Ainsi parle Jésus à l'économie : on continuera d'aller au travail, de semer des traces et des promesses de vie au coeur du monde, de générations en générations, et cette route ne sera pas une suite d'aires de repos. Elle passera de pays en pays, en quête de santé et d'efficacité, de protection et de production : pas de quoi s'y reposer la tête ! A condition d'y poursuivre ainsi l'Humain, encore et toujours !
- Page 4 du blog 2020 : «L'économie gouvernée du dehors – comme nous».