Savoir se régénérer est aussi une qualité du travail

Savoir se régénérer est aussi une qualité du travail / farine au pétrin
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Savoir se régénérer est aussi une qualité du travail
farine au pétrin

Savoir se régénérer est aussi une qualité du travail

Par Jean-Pierre Thévenaz
17 juillet 2019

Eté de notre travail : l’heure de reconstituer des forces, de ne pas en dépenser seulement. Mais cette régénération, ce sont des heures dont la production et les services n’aiment pas tenir compte, les jugeant improductives  – alors qu’elles sont indispensables ! Le temps de récupération ne peut pas être ignoré, même s’il se passe à la maison, au lit, en vacances… et même si on a longtemps délégué aux femmes la charge de ce temps-là. 

Prendre soin de cette régénération, c’est une exigence de qualité : c’est ouvrir les yeux sur l’intégralité de ce dont notre travail a besoin, y inclure la nourriture qui l’a rendu possible, le repos qui le suivra, les compensations qu’il exigera après coup. Et si les femmes suisses, voici un mois, ont fait un jour de grève et de manifestation, c’est entre autres pour ne plus se voir déléguer le souci de la maison, c’est pour que les tâches et les revenus de chacune et chacun incluent l’intégralité des soucis partagés.

Sinon, toutes les tâches deviennent inhumaines, lourdes et déséquilibrées – même si on y consent sous prétexte d’efficacité – et autant celles des employés privilégiés que celles des femmes chargées de la récupération et des soins.

Annonçant l’efficacité divine, notre thérapeute Jésus met strictement en parallèles, et par deux fois, des gestes totalement similaires de femmes et d’hommes. Pour inviter à aller rechercher ce qui est perdu, il parle d’une femme qui recherche un seul sou perdu de son porte-monnaie et aussi d’un berger qui va chercher un seul mouton perdu de son troupeau.

Et pour inviter à laisser travailler la vie, Jésus rapproche deux autres gestes d'attente : celui d’un homme qui a semé, mais laisse grandir une toute petite graine (de moutarde), et celui d’une femme qui a versé du levain dans son pétrin, mais laisse lever la farine.

«A quoi comparer l’efficacité divine ? – A du levain qu’une femme prend et mêle à trois mesures de farine jusqu’à ce que tout lève !» (Luc 13,21)

Notre pain de ce jour est venu de là ! Donc pas seulement d’un acte de production, mais aussi d’une énergie extérieure attendue : de ce temps de non-travail, de cette efficacité externe et divine, de cette croissance qui précède et alimente tous nos gestes productifs.

Nos activités, qu’elles soient de service ou de production, incluent toutes, même sans forcément le reconnaître, leur part de régénération externe, leurs besoins de récréation et de récupération d’énergie. Ce fut aussi le thème d’une soirée que notre association Chrétiens au travail a tenue en avril avec la professeure de médecine du travail Brigitta Danuser, dont j‘ai résumé l’exposé dans notre dernier Bulletin, récemment paru (sur notre site internet chretiensautravail.ch). Elle nous a dit en particulier qu’au vu de recherches en médecine du travail, l’efficacité d’un travailleur baisse beaucoup quand ne sont pas respectés ses besoins de pauses et les maxima hebdomadaires reconnus.

Nous nous laisserons donc encore du temps… jusqu’au prochain de nos blogs! Bon été!

 

(Travaux d’été n° 4 = page 16 du blog «Laisser travailler la vie»)