Laisser travailler la vie… - Printemps actif 1: Bien davantage que nécessaire
Des budgets en milliards, des impôts en milliards, des amendes salées en milliards, des bénéfices en milliards : l’actualité économique nous saoule de gros chiffres, que nous disons ne pas savoir maîtriser. Les printemps, pourtant, nous arrosent de pollens par milliards, de germes et de bourgeons par milliards, de semences prêtes au départ.
Notre réparateur ou thérapeute Jésus nous détournerait-il de cette abondance ? Pas du tout : son récit le plus répété est celui d’un semeur si généreux en semences qu’il se permet d’en lâcher dans tous les coins morts, pourtant improductifs, vu qu’elles se multiplieront largement dans la « bonne terre » (Marc 4 et parallèles).
Et dire qu’on nous bassine aujourd’hui avec la productivité, la compétitivité, la rentabilité !
Aurait-on oublié que la vie (quand elle n’est pas retenue prisonnière de propriétés privées) est bien plus généreuse que nécessaire, bien plus abondante et même gaspilleuse ? Tout germera, poussera ou se transformera, et notre activité va entrer dans ce printemps de germinations pour laisser travailler la vie.
Actifs, nous le serons, comme le semeur. Mais nous dépendons pour cela de cadres financiers que l’histoire de Jésus ignorait à son époque : avant chacune de nos activités, il y a eu des investissements, privés ou publics, eux aussi généreux par milliards, mais canalisés là où ils devront être rentables.
Certes, il existe aussi des pans entiers d’investissements désintéressés, au service d’activités valables : culture, sports, concours, spectacles… Et d’autres, publics ou privés, sont généreux envers des besoins non rentables : protection sociale, éducation, santé… Personne ne se plaindra de pouvoir travailler et se rendre actif dans des institutions investies de telles missions. Mais dans ces activités, restera-t-il une place pour le temps perdu, pour la relation gratuite, pour le partage sur le chemin parcouru ?
On vient d’apprendre que les soignants de chez nous sont majoritairement stressés et souvent en burn out, parce qu’elles et ils aiment bien faire leur travail, avec le recul et le temps nécessaires, mais que les investisseurs et les assureurs n’ont pas prévu ce temps-là, cette générosité-là dans leurs budgets.
Les investissements par milliards, comme la pollinisation au printemps, voilà que notre thérapeute Jésus vient les inciter et les inviter à oser encore davantage la générosité du semeur ! Sa force, c’est de savoir compter sur la générosité des forces naturelles et des récoltes et s’autoriser des pertes marginales de semences.
Cette image du semeur généreux ouvre nos activités à un sens généreux du travail : en laissant tomber des graines dans des coins morts, en nourrissant même au passage les oiseaux, en cédant du terrain aux ronces, on imite l’efficacité du Créateur, car notre monde est ainsi fait.
Pourquoi faut-il que nos investisseurs aient perdu le sens du monde généreux qui pourtant les porte ?