Santé et environnement – Des interpellations aux soignants et au «système»
Dans la Revue médicale suisse du 4 décembre, le professeur Nicolas Senn, un des responsables de la formation des médecins de famille de Unisanté, à Lausanne (dont fait partie la Policlinique médicale), fait une mise au point substantielle sur le sujet et présente des questionnements de haute importance. Il se base notamment sur le « Compte à rebours en matière de santé et de changement climatique » que le prestigieux journal médical Lancet met régulièrement à jour - dernière version en date du 13 novembre. Extraits de son propos :
« Les nouvelles sont mauvaises, on s’y attendait : la terre se réchauffe mais l’humanité continue son business as usual. Pourtant, il s’agit de repenser le lien de la santé avec l’environnement. Les décennies récentes ont largement réduit la santé à des paramètres biochimiques. L’homme vit dans une forme d’illusion d’autosuffisance, totalement déconnecté de son milieu. »
Est évoqué un livre récent de la philosophe française Marie Gaille (Santé et environnement, PUF, 2018) qui aborde la notion du sens. N. Senn à ce propos : « La question du sens est fondamentalement éloignée de finesses statistiques [pour lesquelles nous nous passionnons]. C’est peut-être là la révolution : aller au-delà de l’épidémiologie, pour retrouver un sens. » Dans la foulée, donner plus d’attention à l’interaction nécessaire avec l’environnement. Hippocrate faisait ce lien il y a plus de 2000 ans.
Quel rôle alors des soignants ? D’abord, revoir leurs propres représentations de la santé et de la maladie. « Peut-être, et on ose à peine le dire, devrions-nous, dit le prof. Senn, moins nous occuper de tel taux sanguin chez nos patients, et plus de leur milieu de vie et de leur intégration dans la communauté ? Il y a là un savoir à créer. »
Et, en conclusion, un point majeur. « Oui, il y a urgence, mais force est de constater qu’il y a urgence et urgence. D’un côté celle de l’ambulance, tout le monde respecte et applaudit. De l’autre les urgences invisibles, notamment climatiques – visibles seulement par ceux qui savent regarder, qui trop souvent sont vus comme des idéaliste ou des extrémistes. » Quand on ne les traite pas de terroristes (voir les procès à venir contre de jeunes manifestants – on marche sur la tête !). Ces jeunes ont créé quelques perturbations c’est vrai mais, s’agissant des enjeux planétaires, les puissances qui comptent, dont la finance, portent une responsabilité majeure dans des bouleversements bien plus graves. Se demander alors qui devrait être interpelé et même sanctionné, comment et combien ?