Quand le doute rassure…

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Quand le doute rassure…

Par Isabelle Ott-Baechler
15 mai 2020

Durant ces semaines de confinement volontaire, j’ai suivi avec curiosité, intérêt et attention les prises de parole et décisions des autorités politiques et sanitaire. J’ai assisté à mes propres changements, passant du déni à la prise de conscience de la propagation rapide de ce virus et du danger qu’il peut représenter pour les personnes à risque dont je suis. J’ai adopté une attitude prudente, tout en sortant quotidiennement pour de belles marches dans la forêt.

Au moment du déconfinement progressif, je mesure le chemin parcouru et fais un constat. Tout au long de ces semaines, j’ai été rassurée quand les autorités exprimaient les limites de leurs connaissances, leurs doutes et le chemin qui les avait amenées à telle décision lourde de conséquences.

 

Bien sûr, nous aurions tellement souhaité des réponses tranchées et définitives à nos questions.

 

Dès le début du confinement, nous voulions connaître la date de sa fin. Médecin en chef à l’OFSP, Daniel Koch ne pouvait pas nous donner une réponse définitive, expliquant que cela dépendait du moment où nous aurions atteint le pic de la pandémie en Suisse. « Or il n’en sait rien, pas plus que moi d’ailleurs » écrit fort judicieusement le journaliste du Temps Michel Guillaume, dans un excellent article intitulé « Les journalistes, ces narrateurs de l’urgence »https://www.letemps.ch/suisse/journalistes-narrateurs-lurgence. Il ajoute : « Nous ne nous apercevrons qu’à mi-avril que ce pic a été dépassé à fin mars déjà (…) »

 

Porter le masque ou non fut une autre question récurrente au moment du déconfinement.

 

Malgré les pressions, les réponses de l’épidémiologiste des HUG, Didier Pittet, furent nuancées : le port du masque n’était pas la panacée ; même s’il est recommandé quand la distance entre les personnes ne peut être respectée, il comporte le risque d’être rassurant à bon compte invitant à ne plus respecter les gestes barrières.

 

Autant le conseiller fédéral Alain Berset que les médecins ont refusé d’endosser le rôle de celui qui se barde de certitudes. Nous avons dû quitter le confort de nos habitudes, renoncer à nos affirmations à l’emporte-pièce et aux nouvelles lénifiantes. Les nuances, les contradictions, les informations qui évoluent de semaine en semaine nous ont confronté aux limites humaines, à l’incertitude. Nous avons dû (ré)-apprendre à nous débrouiller avec nos doutes, nos questions sans réponses et nos angoisses. Nous avons dû faire des choix, en adultes responsables de nous-mêmes et des autres.

 

Ma vive reconnaissance s’adresse aux autorités politiques et sanitaires qui se sont impliquées pleinement pour contrer cette pandémie assumant, dans la solitude souvent, les angoisses de décisions lourdes de conséquences : merci de ne pas nous avoir rassurés à bon compte.

J’exprime ma solidarité à celles et ceux qui ont vu s’effondrer dans cette crise le travail de leur vie, qui ont vécu la mort d’un proche sans pouvoir partager leur peine en communauté ou vu leur santé atteinte profondément.